Ventes aux enchères

Après la folie Jammes... Drouot est demeuré très sage

Par Éric Tariant · Le Journal des Arts

Le 3 décembre 1999 - 609 mots

Face au coup de tonnerre de la vente Jammes, ses folles enchères et ses 75 millions de francs de produit, les résultats des trois ventes organisées au mois de novembre à Drouot (le 16 par l’étude Millon, le 19 par Piasa et le 22 par François Tajan) font pâle figure. L’explosion du marché qu’a connu Londres apparaît comme un « épiphénomène » qui n’a pas affecté le marché français, resté très raisonnable. Quelques bons résultats ont néanmoins été obtenus, notamment par des photographies de Dora Maar et de Cartier Bresson.

PARIS - Les prix exceptionnels de la vente Jammes, qui s’est tenue le 27 octobre à Londres, n’ont pas influé sur les cotes des photographies vendues à Drouot au mois de novembre, ni sur les enchères qui ont été épargnées par le vent de folie qui avait soufflé outre-Manche. Les 507 000 livres sterling (5,2 millions de francs) obtenus à Londres par la Grande vague de Gustave Le Gray n’ont pas enflammé les prix des deux tirages albuminés du photographe mis en vente le 22 novembre à Drouot par François Tajan. Ces deux marines datant du milieu du XIXe siècle (vers 1856) sont parties, l’une dans la fourchette de l’estimation, l’autre en dessous. La première, une belle image considérée comme un chef-d’œuvre du photographe et qui avait été exposée à la Photographic Society de Londres en décembre 1856, a été adjugée 130 000 francs ; la seconde, un effet de soleil à travers les nuages, 100 000 francs. Une épreuve originale d’époque sur papier albuminé d’Édouard Baldus, vendue le 19 novembre chez Piasa, a été enlevée à 125 000 francs, trois fois moins que le prix réalisé par la même image – une épreuve sur papier salé – vendue 36 700 livres un mois plus tôt à Londres. Le tirage présenté à Drouot n’offrait pas la même qualité et ne disposait pas du pedigree prestigieux (la collection Jammes) de celle de Londres. Quelques beaux résultats ont pourtant été enregistrés à Drouot le même jour, où l’expert Michèle Chomette proposait 99 photographies de Dora Maar qui ont réalisé un total de 2,1 millions de francs. La plus forte enchère est allée à un Portrait avec effet de chapeau “très picassien” de Dora Maar, 220 000 francs, suivi par Le Gamin au coin de la rue des Genets, 76 000 francs, et par un très beau Portait de Dora Maar, 70 000 francs, qui a quintuplé son estimation, il est vrai très faible. “J’ai volontairement proposé des estimations très raisonnables, estimant que les portefeuilles seraient vides après la vente Jammes”, explique Michèle Chomette. Plusieurs retirages de négatifs anciens que Dora Maar a réalisés dans les années quatre-vingt ont obtenu de bons prix, comme la Main sortant d’un coquillage (33 000 francs), dont le photomontage d’époque est conservé dans les collections du Musée national d’art moderne de la Ville de Paris. Un tel prix est surprenant, le marché étant d’ordinaire plus réceptif aux tirages d’époque.

La vente organisée le 16 novembre par Viviane Esders, avec le concours de l’étude Millon, a enregistré des résultats plus mitigés. L’ensemble, constitué de 250 lots, a produit un total de 959 500 francs, la plus forte enchère allant à un tirage argentique d’époque de Cartier-Bresson, Cuba, 1934, Carrousel, 155 000 francs, l’accessit étant emporté par une Étude de nu de Frantisek Drtikol (1929), 38 000 francs. Les autres enchères n’ont que rarement dépassé la barre des 20 000 francs, la plupart des lots étant adjugés moins de 8-10 000 francs, comme Bagatelle, un tirage albuminé d’époque d’Eugène Atget, 6 500 francs, ou une image montrant l’artiste de music-hall D’A-Lal en train de danser, 10 000 francs.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°94 du 3 décembre 1999, avec le titre suivant : Après la folie Jammes

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