Ventes aux enchères

Le petit-fils d’Alfred Dreyfus mécontent de la vente d’une lettre de son grand-père

Par Sarah Barry · lejournaldesarts.fr

Le 31 mai 2013 - 469 mots

PARIS

PARIS [31.05.13] – Une lettre du capitaine Alfred Dreyfus, adressée au ministre de l’Intérieur en 1895, a été adjugée 457 500 euros (frais compris) dans une vente orchestrée par Sotheby’s Paris le 29 mai 2013. Le petit-fils de l’officier aurait préféré voir ce document rejoindre la BNF ou le Musée d’art et d’histoire du judaïsme.

L’affaire Dreyfus continue de faire l’actualité. Les documents qui témoignent de toute l’histoire font l’objet d’une vaste entreprise de numérisation, notamment portée par le site L’affaire Dreyfus. Ils sont également devenus les vedettes de ventes aux enchères depuis plusieurs années.

Une lettre écrite par Alfred Dreyfus le 26 janvier 1895, à l’intention du ministre de l’Intérieur Charles Dupuy, a été adjugée 457 500 euros (frais compris) le 29 mai 2013 chez Sotheby’s. Estimé entre 100 000 et 150 000 euros, puis mis à prix 70 000 euros, le document a été remporté par un collectionneur demeuré volontairement anonyme.

Publiée et retranscrite sur le site L’affaire Dreyfus, la lettre a été écrite à St-Martin-de-Ré, un mois après la condamnation pour trahison du capitaine Dreyfus et peu avant son embarquement pour le bagne et l’île du Diable. Les premiers mots témoignent de sa détresse et de la gravité de sa situation : « J’ai été condamné pour le crime le plus infâme qu’un soldat puisse commettre, et je suis innocent ». Y sont évoquées les grandes valeurs qui seront brandies par les dreyfusards (vérité, honneur, justice) ; c’est un document émouvant, qui touche le lecteur par son caractère intime.

Charles Dreyfus, petit-fils de l’officier qui ne sera réhabilité qu’en 1906, a fait connaître son opposition morale à une vente que la famille Dreyfus « n’a en rien provoquée » : « nous ne faisons pas commerce des archives privées, comme des archives de statut public, d’Alfred Dreyfus ». Et d’ajouter : « c’est contraire à nos traditions familiales ».

La lettre aurait été achetée par son dernier propriétaire à la librairie Charavay en 1996 ; Charles Dreyfus ignore comment elle a « quitté les archives familiales », mais ne remet pas « en cause la propriété de la lettre par son détenteur actuel ». Il lui a cependant demandé, par principe et dans une lettre ouverte, de renoncer à la vente, sans pour autant croire à une quelconque rétractation : « pourquoi l’aurait-il fait ? Il ne fait pas partie de la famille ». Il tenait avant tout à rappeler que la famille Dreyfus s’est « constamment appliquée à donner, par legs successifs, ses archives, tant à la Bibliothèque nationale de France qu’au Musée d’art et d’histoire du judaïsme ».

Sotheby’s a insisté sur la légalité de cette vente, qui s’appuyait sur des informations précises concernant la provenance. Les Archives de France ont donné leur feu vert, et la lettre disposait par ailleurs d’un certificat d’exportation.

Légende photo

La lettre autographe signée d'Alfred Dreyfus, dépôt de saint-Martin-de-Ré, le 26 janvier 1895 - vente du 29 mai 2013 chez Sotheby's - Estimation 100.000 / 150.000 € - Adjugé 457.500 € - Photo www.sothebys.com

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