Restauration

La restauration de « La Cène » de Léonard de Vinci réalisée en 1999 comporterait une erreur

Par Chloé Da Fonseca · lejournaldesarts.fr

Le 15 mars 2012 - 503 mots

MILAN (ITALIE) [15.03.12] – Les restaurations de « La Cène » de Léonard de Vinci s’étaient achevées en 1999 après 20 ans de travaux. Le 13 mars 2012, le directeur d’ArtWatch, Michael Daley, a annoncé avoir constaté que le restaurateur avait fait une erreur dans les repeints de la figure du Christ. PAR CHLOÉ DA FONSECA

Le différend peut sembler anecdotique. La maladresse de restauration relevée par ArtWatch (« chien de garde » des restaurations d’art) tient à un détail : après les repeints, la manche de la main droite du Christ repose sur la table, alors que les nombreuses copies de l’œuvre de Léonard de Vinci montrent que la draperie de la manche retombe derrière la table.

Michael Daley a comparé la figure actuelle du Christ à des photographies précédant la restauration et à des copies, dont la version presque contemporaine de Giampietrino, disciple du maître florentin. Cette copie (conservée à la Royal Academy of Arts de Londres) a en effet été effectuée seulement deux décennies après l’original du monastère de Santa Maria delle Grazie qui date de 1498. Il base également son étude sur une gravure considérée comme la plus proche copie de La Cène et datée de 1500. Dans The Independent, Michael Daley suppose qu’ « il y a peut-être maintenant une présentation sérieusement inexacte de la composition finale de Léonard de Vinci ».

La dernière restauration, de 1978 à 1999, avait divisé la communauté artistique de l’époque. ArtWatch relance la polémique. Michael Daley se dit surpris que les restaurateurs aient ignoré l’œuvre de Giampietrino. « Pourquoi ce témoignage, prouvant que la draperie du manchon retombe derrière la table, n’a-t-il pas été pris en compte ? ».

Le professeur Pietro Marani, responsable des restaurations à l’époque, minimise la controverse ironisant : « Un petit bout de draperie. Oh, mon Dieu ! ». Il présume que le restaurateur avait dû trouver des pigments rouges apparemment liés à la draperie de la manche, ce qui l’a incité à repeindre ainsi. Argumentant que les copies altèrent parfois les détails (les couleurs ou les objets posés sur la table), s’y fier peut aussi prêter à confusion. Mais Michael Daley rejète cette théorie : les copies peuvent, certes, présenter des différences infimes avec l’original, mais le nombre élevé de copies de La Cène montrant le même détail au niveau de la manche du Christ semble indiquer que le remodelé actuel n’est pas conforme à l’historique de l’œuvre.

La Cène est l’une des œuvres les plus célèbres de l’art de la Renaissance, pourtant il ne reste que peu de traces de la main même du maître. La technique expérimentale employée par Léonard de Vinci n’était pas concluante et les détériorations de la fresque ont débuté à peine l’œuvre achevée. Le dernier chantier avait pour but de nettoyer l’œuvre, d’enlever les restaurations antérieures et de stopper son délabrement. Charles Hope, expert de Léonard de Vinci, estime que l’intégralité de la restauration était « inutile » tant il reste peu de choses de l’original du maître. « C’est seulement à travers Giampietrino et les autres copies que l’on peut se faire une idée de la véritable fresque ».

Légende photo :

Léonard de Vinci (1452–1519) La Cène, 1495-1498 - Huile et détrempe sur mur sec - Santa Maria delle Grazie, Milan (Italie) - source Wikimedia

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