Entretien avec David Nordmann, commissaire-priseur, dirigeant de la SVV Ader, Paris

« Faire entrer Drouot dans le XXIe siècle »

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 27 avril 2011 - 668 mots

JDA : Vous êtes classé 20e maison de ventes française dans la catégorie « Art et objets de collection » pour l’année 2010 par le Conseil des ventes volontaires. Comment expliquez-vous votre ascension ?

David Nordmann : Les gens nous font confiance. Nos frais vendeurs sont compétitifs. Nous sommes actifs et, apparemment, nous vendons bien. Nous cataloguons un maximum de lots et avons une importante politique de diffusion sur Internet. La croissance de notre société depuis 2008 est aussi la conséquence de notre déménagement, en 2009, au 3, rue Favart [2e arr. à Paris]. Au moment où nos concurrents resserraient leur budget, nous investissions dans des locaux avec pignon sur rue : nos clients n’ont pas l’impression d’être reçus dans l’arrière-boutique d’une quincaillerie, sans être non plus intimidés par le luxe affiché des grosses maisons de ventes. Nous sommes proches de Drouot, sans en être esclave. Cela m’a permis d’étoffer mon équipe et de travailler dans de meilleures conditions (salle d’exposition où je peux vendre, organisation de cocktails et réceptions, mise en valeur des objets et autres services à la clientèle), donc de développer nos affaires. Entre 2008 et 2009, notre chiffre d’affaires a progressé de 8 % malgré la crise. Entre 2009 et 2010, nous sommes passés de 6,7 à 10,4 millions d’euros de chiffre d’affaires, soit une progression de 55 %.

Pourquoi vous êtes-vous lancé tardivement dans le métier de commissaire-priseur ?
D.N. : C’est une profession que l’on n’a pas intérêt à exercer trop jeune et la multiplication des expériences est un atout. Je suis commissaire-priseur diplômé depuis 1997, mais je ne me suis pas installé avant 2005. J’en ai profité pour réaliser d’autres projets : consulting informatique et courtage sur Internet.

Qu’est-ce qui vous a décidé à racheter la maison Ader ?
D.N.
:
Le profil de cette maison de ventes correspondait en tout point à ce que je recherchais. Son historique sur le marché de l’art remonte au XVIIe siècle et le nom mythique d’Ader s’impose comme une marque. Quand je l’ai reprise en janvier 2005, sa structure était petite, mais économiquement saine, avec une réelle capacité de développement. Je me suis tout de suite entendu avec son dirigeant, Rémi Ader, qui reste actionnaire minoritaire et apporteur d’affaires. Fort de ses quarante ans de métier, il nous livre des conseils enrichissants, en plus des archives de la maison Ader depuis 1935.

Quelle est votre actualité des ventes à venir ?
D.N. : Le 26 mai à Drouot, nous disperserons les archives de la famille Heugel, éditrice de musique, retraçant 140 ans d’histoire musicale d’Offenbach à Boulez : manuscrits musicaux, 4 000 lettres d’artistes (Proust, Fauré, Gounod, Musset…), des photos dédicacées, des affiches d’opéras célèbres et un piano Pleyel de 1875 gravé de 21 signatures des plus grands noms de la scène lyrique de la fin du XIXe siècle. J’enchaîne, le 1er juin, avec le fonds Michel Magne, compositeur avant-gardiste de génie, auteur de musiques expérimentales, électroacoustiques et tachistes dans les années 1950. Il a fait fortune dans la musique de films, avant d’être ruiné par le fisc en 1974. Il a alors l’idée de tresser ses bandes magnétiques et de les transformer en œuvres plastiques, avec le soutien de César et Pierre Restany. Je vends ses compositions plastiques, ses partitions et quelques manuscrits inédits de Françoise Sagan retrouvés dans ses archives. Cet automne, nous aurons une très importante collection consacrée à Sacha Guitry ainsi que la succession Jean-Émile Laboureur.

Vous êtes membres de Drouot Avenir. Quel est le but de cette nouvelle association ?
D.N. : Fondé en début d’année par une vingtaine de commissaires-priseurs motivés, Drouot Avenir est une association des utilisateurs de l’hôtel Drouot. L’objectif est de faire enfin entrer Drouot dans le XXIe siècle et de le transformer en véritable société de services. C’est un outil formidable, plus moderne qu’il en a l’air, avec un potentiel de développement exceptionnel. Mais il manque encore d’ambition, de projets et de stratégie de développement. En tant que vaisseau amiral de toute une profession, Drouot doit se moderniser.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°346 du 29 avril 2011, avec le titre suivant : Entretien avec David Nordmann, commissaire-priseur, dirigeant de la SVV Ader, Paris

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