Synthétisme

Le pari de Pont-Aven

Avant d’entreprendre sa rénovation, le musée des beaux-arts de Pont-Aven fête ses 25 ans.

Par Sophie Flouquet · Le Journal des Arts

Le 18 octobre 2010 - 639 mots

Quoi de plus légitime pour justifier des importants investissements financiers dont va prochainement bénéficier le musée que de rendre hommage aux nombreux donateurs qui ont soutenu l’aventure de sa création ?

PONT-AVEN - Pour son 25e anniversaire, le jeune Musée des beaux-arts de Pont-Aven (Finistère) présente un florilège de ses collections, dont la majeure partie a été acquise grâce à des dons, en nature ou en numéraire. « Cette exposition illustre une période charnière, avant que le musée ne procède à sa "recréation" », confirme Isabelle Biseau, maire de cette commune de 3 000 habitants rendue célèbre pour avoir accueilli notamment Gauguin, Bernard et Sérusier. Car l’histoire de ce petit établissement est aussi celle d’un projet totalement déraisonnable à son origine : bâtir de toutes pièces un musée sans collection de départ, à une époque où le prix des œuvres de l’école de Pont-Aven s’était déjà envolé sur le marché de l’art. L’idée a vu le jour dès les années 1960, à l’initiative d’un expert parisien, Maurice Malingue – père du galeriste de l’avenue Matignon (Paris-8e). 

Au fil des ans, après avoir présenté dans les salles municipales des expositions temporaires estivales à succès, le projet d’un véritable musée a fait son chemin. Il sera rapidement porté par des amateurs, fédérés plus tard au sein de la société des amis du musée et se concrétisera en 1984 grâce à l’engagement de la municipalité. Cela contre l’avis du ministre de la Culture de l’époque, Jack Lang, qui sera plus tard démenti par son administration.

À force de ténacité, plus de mille numéros se sont agrégés pour constituer un noyau d’œuvres destiné à relater l’aventure de cette école ancrée à Pont-Aven, terre natale du célèbre Talisman de Sérusier, toile manifeste du synthétisme aujourd’hui conservée au Musée d’Orsay. Progressivement, les collections se sont étoffées, « grâce à la conjonction des descendants d’artistes, de collectionneurs et de mécènes », rappelle Catherine Puget, première conservatrice des lieux, dans le catalogue publié pour l’occasion.

La sélection de deux cent cinquante œuvres choisies pour cette exposition représente donc autant de jalons de l’histoire du musée. Outre quelques pièces phares, comme un pastel de Gauguin préempté en 2003 pour 460 000 euros grâce à une mobilisation exceptionnelle de mécènes locaux, ces œuvres illustrent l’école de Pont-Aven sous toutes ses facettes – plus ou moins brillantes – mettant particulièrement en valeur les colonies d’artistes étrangers qui ont précédé Gauguin et ses amis. Mais avec ses 50 000 visiteurs annuels, le musée est aujourd’hui parvenu à un point de saturation qui rend urgente une remise à niveau de ses équipements, en termes d’accueil du public mais aussi de sécurité, afin notamment de pouvoir prétendre à de nouveaux dépôts de musées nationaux.

Mis au point depuis l’arrivée en 2006 de sa nouvelle directrice, Estelle Guille des Buttes-Fresneau, le projet scientifique et culturel, validé dès avril 2008 par le ministère de la Culture, prévoit un doublement des superficies d’exposition grâce à un déménagement dans les actuels locaux de l’hôtel de ville, mitoyens du musée. Par le biais du plan musées lancé en septembre par le ministre de la Culture, l’État a d’ores et déjà donné son quitus pour une ouverture prévue en 2014, sans pour autant en définir l’enveloppe financière. Région et Département ont affirmé vouloir s’engager dans une aventure qui, pour Isabelle Biseau, requiert « beaucoup d’audace, de volonté et sans doute d’inconscience ». L’objectif serait à terme de faire passer l’équipement sous la tutelle de la future communauté d’agglomération, cela afin de porter financièrement l’ambition nouvelle d’un musée qui a su démontrer sa pertinence.

Musée des beaux-arts de Pont-Aven

Place de l’Hôtel-de-Ville, 29930 Pont-Aven, tél. 02 98 06 14 43. Exposition actuelle, « Les 25 ans du musée, un quart de siècle d’acquisitions », jusqu’au 2 janvier 2011, tlj 10h-12h30, 14h-18h, www.museepontaven.fr

En savoir plus sur le Musée des Beaux-Arts de Pont-Aven

Légende photo

Paul Gauguin - "Deux têtes de Bretonnes" - Pastel – 1894
Collection du Musée de Pont-Aven © DR

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°333 du 22 octobre 2010, avec le titre suivant : Le pari de Pont-Aven

Tous les articles dans Patrimoine

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque