Photographie

Magnum marque l’essai

Anniversaire et carte blanche aux photographes

Par Le Journal des Arts · Le Journal des Arts

Le 4 février 2000 - 682 mots

Magnum fête son cinquantième anniversaire avec une exposition rassemblant quelque quatre cents images prises au cours des dix dernières années par cinquante-six de ses membres, du père fondateur Henri Cartier-Bresson aux défenseurs d’un tout autre style, comme Martin Parr. Actuellement accrochée à Londres et Paris, l’exposition, qui circulera aux États-Unis et au Japon, se veut "une suite d’essais engagés" offrant certains inédits.

LONDRES/PARIS - À la différence de “Our time”, qui marquait le quarantième anniversaire de Magnum à la Hayward Gallery de Londres, en 1989, en reprenant les grands moments de l’agence, l’actuelle commémoration est basée en partie sur les fruits d’une carte blanche donnée aux photographes. En 1997, en effet, chaque membre a reçu une bourse pour effectuer un projet “libre de toute contrainte”, grâce au soutien de partenaires comme le Groupe CCF, Kodak, Canon, Dai Nippon Printing. L’exposition commence là où se terminait celle de 1989 : la chute du mur de Berlin et les événements de Tienanmen. Elle est structurée en trois sections : “Persistance des rituels” étudie les fondements de la société, la famille, les célébrations religieuses et les traditions séculaires (Le Maroc traditionnel par Bruno Barbey, Les Tulkus par Martine Franck…) ; “Chroniques du chaos” rassemble des images de guerre, de pauvreté, de catastrophes écologiques, de répression et de désespoir (L’Europe centrale par Joseph Koudelka, les “crack dealers” à New York par Susan Meiselas) ; enfin, “Esthétiques du quotidien” détaille nos modes de vie, en matière d’architecture, de consommation (les clichés européens par Martin Parr, Central Park par Bruce Davidson…). Dans ce dernier chapitre figurent aussi quatre nouveaux portraits d’Henri Cartier-Bresson, aujourd’hui âgé de quatre-vingt-onze ans, qui confirment que le dernier survivant des membres fondateurs n’a toujours pas rangé son appareil au profit du seul crayon à dessin… In fine, l’exposition accrochée à la Bibliothèque nationale de France brasse tous les styles personnels et les partis pris esthétiques, du noir et blanc classique aux couleurs saturées, de la saisie de l’instant décisif à la contemplation, du respect à la dérision, dans tous les types de format… À l’issue de la tournée, Magnum fera don de l’ensemble des œuvres à la BnF. En écho, la Fnac va présenter seize monographies dans ses galeries photo.

Un président élu
Fondée en 1947 par Robert Capa, “HCB”, George Rodger et David “Chim” Seymour, pour notamment défendre le droit d’auteur, Magnum est une coopérative gérée exclusivement par ses photographes. Elle en rassemble aujourd’hui soixante, devenus membres par cooptation. La particularité de Magnum réside dans sa structure : les nominees (candidats) doivent passer au stade d’associés avant de pouvoir être acceptés comme membres. Le passage au niveau supérieur se fait sur vote de tous les membres, après examen du portfolio. À chaque candidat est assigné un mentor qui le guide pendant son “apprentissage”, jusqu’à ce qu’un vote à la majorité le désigne comme associé. Un membre associé travaille à plein temps pour Magnum mais ne possède pas de part de la société. Magnum a un président élu (actuellement Abbas, d’origine Iranienne et résidant à Paris), et un directeur administratif pour chaque rédaction, à Paris, Londres, New York et Tokyo qui emploient soixante-quinze personnes, ainsi qu’un réseau global d’une quinzaine d’agents. D’autres photographes collaborent à l’agence, souvent des anciens qui ont renoncé à leur titre de membre mais travaillent occasionnellement pour Magnum, et certains correspondants éloignés géographiquement. Ses membres travaillent à leurs propres projets de livres et d’expositions, tout en répondant à des commandes pour la publicité ou les entreprises. Magnum, qui a résisté aux offres de Corbis et Hulton Getty, achève la numérisation de son fonds qui compte un million de documents depuis les années trente.

- MAGNUM, ESSAIS SUR LE MONDE, jusqu’au 7 mai, Bibliothèque nationale de France-site Richelieu, 58 rue de Richelieu, 75002 Paris, tél. 01 53 79 59 59, tlj sauf lundi 10h-19h, dimanche 12h-19h. Catalogue, introduction de Michaël Ignatieff, éd. Phaidon, 536 p., 617 ph., 399 F. Simultanément, MAGNUM, OUR TURNING WORLD, jusqu’au 12 mars, Barbican Art Gallery, Barbican Center, Silk Street, Londres, tél. 44 171 382 71 05, tlj 10h-18h45, mardi 10h-17h45, mercredi 10h-19h45, dimanche et jf 12h-18h45.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°98 du 4 février 2000, avec le titre suivant : Magnum marque l’essai

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