Francis Briest : Un pôle Briest-Artcurial

Francis Briest s’associe à Nicolas Orlowski, avec l’appui de Dassault

Par Éric Tariant · Le Journal des Arts

Le 12 octobre 2001 - 1018 mots

Briest, troisième étude française avec 183 millions de francs de produit en 2000, leader sur le marché français des ventes d’art impressionniste, moderne et contemporain, se rapproche d’Artcurial avec l’appui financier du groupe Dassault. L’objectif de Francis Briest et de Nicolas Orlowski, P-DG d’Artcurial, est de créer un groupe européen d’activités artistiques et culturelles autour d’une enseigne commune : Artcurial. Francis Briest répond aux questions du Journal des Arts.

Quelle forme va prendre votre rapprochement avec Artcurial ?
La loi du 10 juillet 2000 permet de créer des sociétés à objet civil pour diriger des ventes volontaires publiques. Nous avons saisi l’opportunité offerte par ces textes pour former avec Artcurial un groupe européen d’activités artistiques et culturelles. Le capital va être réparti entre notre société de vente aux enchères publiques, Artcurial et le groupe Dassault. Ce nouvel ensemble se développera en deux pôles ; le premier sera constitué par la maison de vente aux enchères publiques et d’expertise Artcurial-Briest ; le second, sous l’enseigne Artcurial, consistera en un vaste ensemble culturel regroupant des éditions d’œuvres d’art (sculptures, estampes), une librairie d’art, un lieu de ventes privées, des ventes en ligne ainsi qu’une galerie d’exposition à but non commercial.
Nous allons pouvoir rapprocher deux clientèles et deux méthodes de travail. Un collectionneur, qui avait acquis en juin une œuvre de Matta dans une de nos ventes publiques organisée à l’hôtel Dassault, souhaitait se procurer un ouvrage sur l’artiste. Il n’a eu qu’à descendre quelques étages pour se rendre à la librairie d’Artcurial et l’acheter.

Allez-vous emménager à l’hôtel Dassault dans les prochaines semaines ?
La maison de vente “Artcurial-Briest” fonctionnera dès l’hiver 2001.
L’implantation de l’ensemble des activités dans la totalité de l’hôtel Dassault s’effectuera progressivement jusqu’à la fin de l’été 2001. L’hôtel dispose d’une surface totale de 3 500 mètres carrés.

Toutes vos ventes vont-elles s’y dérouler ?
Non, nous opérerons une sélection. Nos ventes importantes d’œuvres modernes et contemporaines se tiendront à l’hôtel Dassault, les autres à Drouot. Nous allons, en outre, élargir notre activité à d’autres spécialités du XXe siècle comme les livres et la photographie. La nouvelle loi nous offre désormais la possibilité de nous associer à d’autres sociétés, de partager notre capital. Nous allons recouvrir le visage d’une entreprise qui bouge et évolue.

Vous songez aussi à un rapprochement avec d’autres études ?
Nous ne pouvons pas pour l’instant annoncer de noms. Mais il s’agit en effet d’un de nos objectifs, où tout généraliste ou spécialiste pourraient avoir leur place.

Vous vous êtes positionnés sur un marché, celui de l’art moderne et contemporain, qui est très concurrentiel. Ne craignez-vous pas que cette concurrence soit encore exacerbée par l’entrée en scène à Paris de vos principaux concurrents, Christie’s, Sotheby’s et Phillips ?
Il y a vingt ans que nous travaillons sur ce marché extrêmement concurrentiel. Nous sommes parfaitement préparés à cette concurrence. Grâce à l’ouverture, Paris va retrouver sa prééminence sur le marché européen. Il n’est pas interdit de penser que des ventes d’œuvres modernes reviennent en force sur les bords de Seine malgré les obstacles fiscaux qui demeurent.

En quoi votre participation à l’International Auctioneer constitue-t-elle un atout pour l’étude Briest ?
La participation à cette association nous permet d’accéder à une diffusion quasi planétaire. Le réseau est en effet international : nos partenaires sont implantés à Sydney, San Francisco, New York et en Europe à Stockholm, Vienne, Cologne, Zurich, Genève, Milan, Rome et Madrid.
Nous pouvons faire circuler l’information et atteindre des clients qui ne figurent pas dans nos fichiers par le biais de mailings et de catalogues communs. Nous pouvons ainsi présenter nos meilleurs pièces dans les catalogues de nos partenaires. Cette structure nous permet aussi d’échanger des informations afin, par exemple, d’authentifier ou de mieux vendre telle ou telle œuvre. Il pourrait, peut être, y avoir dans l’avenir des rapprochements “capitalistiques” entre ces sociétés, qui sait ?

Comment voyez-vous le paysage des ventes publiques françaises qui naîtra de l’ouverture du marché ?
Ce paysage est parfaitement dessiné. Il a été annoncé il y a quelques années. Quelques maisons de vente étrangères, déjà installées, vont désormais vendre sur le territoire français. Une recomposition du marché parisien est en train de s’opérer autour d’un nouvel axe qui reliera le faubourg Saint-Honoré à l’avenue Matignon et à l’avenue Montaigne. Il y aura une économie de quartier un peu à l’image de ce qui existait au XVIIIe siècle avec des rues spécialisées par métiers. Notre nouvel ensemble Artcurial-Briest sera situé sur cet axe. Dans toutes les grandes capitales, l’activité du marché de l’art se concentre sur quelques rues, à Londres autour de New Bond Street, à New York, autour de Madison ou à Chelsea pour les galeries.

L’organisation de vos plus grandes ventes à l’hôtel Dassault va entraîner un manque à gagner pour Drouot. Quel va être son avenir ?
Drouot perdurera car c’est un endroit formidable qui a une image connue, une enseigne intéressante et qui présente souvent des objets de qualité. Mais en termes de marketing, il est difficile de reconnaître ses petits dans cette maison commune. Le marché parisien devrait grossir et la plupart des acteurs devraient en profiter.

Que pensez-vous de la loi d’ouverture du 10 juillet 2000 et des décrets d’application ?
Cette loi nous donne accès à des outils capitalistiques très importants. Nous pouvons quitter le statut de profession libérale pour créer de véritables sociétés de service. L’argent est nécessaire dans notre métier et ce statut nous permet de drainer des capitaux. Cette loi est cependant un peu restrictive. Les ventes de gré à gré ne seront pas possibles dans le cas de la société réalisant des ventes aux enchères ; en revanche, rien n’empêchera la vente de gré à gré par l’intermédiaire d’une autre société dont ce sera l’objet. C’est en fait une réforme incomplète. Nous ne sommes pas encore au diapason de ce qui se passe à New York ou à Londres. L’agrément qui doit être délivré aux commissaires-priseurs par le Conseil des ventes témoigne de la manie française de tout réglementer. Il est surprenant que ce soit une autorité de régulation qui juge de la qualité de notre travail et non pas nos clients.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°134 du 12 octobre 2001, avec le titre suivant : Francis Briest : Un pôle Briest-Artcurial

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