Chantal Nedjib

Déléguée générale de la Fondation CCF pour la Photographie

Par Olivier Michelon · Le Journal des Arts

Le 13 septembre 2002 - 965 mots

Chantal Nedjib est déléguée générale de la Fondation CCF pour la Photographie, créée en 1995. Alors que la Fondation vient de remettre un prix à ces deux nouveaux lauréats (Laurence Demaison et Rip Hopkins, qui exposent actuellement à Paris à la galerie Baudouin Lebon), Chantal Nedjib commente l’actualité.

Parmi les chantiers annoncés par le ministère de la Culture, figure la mise en place de mesures fiscales visant à inciter le mécénat. Que pensez-vous de cette orientation ?
C’est une nouvelle encourageante et je souhaite sincèrement à Jean-Jacques Aillagon d’être entendu. C’est un signal fort de considération lancé aux Français que de proposer de nouvelles incitations pour accéder à la culture et de favoriser l’implication des entreprises. On ne peut pas demander aux entreprises et aux particuliers de favoriser le mécénat et d’aider le domaine culturel sans aucune contrepartie.

Dans le même temps, le budget du ministère semble menacé par les arbitrages gouvernementaux. Un nouvel équilibrage entre interventions privées et publiques dans le domaine culturel vous semble-t-il nécessaire ?
Si le budget est renforcé, je dis bravo. Je n’ai pas entendu dans les propos du ministre de la Culture que l’État souhaitait le moins du monde se désengager de sa mission de soutien à la production et à la diffusion la plus large possible de la culture. En revanche, il est certain que les entreprises mécènes ont besoin d’une juste reconnaissance, qui passe notamment par une amélioration des conditions fiscales liées au mécénat.

Les musées français semblent de plus en plus amenés à recourir au mécénat, à la recherche de fonds privés.
Cette pratique est très courante aux États-Unis et dans d’autres pays, qui développent ainsi des actions très intéressantes. Le public et le privé savent faire bon ménage. Tout ce qui sera fait pour favoriser l’initiative privée me semble bon pour le développement de la culture. Pour donner un exemple de collaboration que je connais bien, le CCF a été partenaire à plusieurs reprises du Centre Georges-Pompidou pour des expositions de photographie. De notre point de vue, cela a été très positif. Un partenariat de ce type implique que l’institution comprenne aussi ce que l’entreprise attend. Il est normal qu’une entreprise cherche un retour à son investissement. Elle doit rendre des comptes à ses actionnaires et faire comprendre à ses salariés pourquoi elle donne de l’argent pour une activité aussi éloignée de son objet. Il ne doit y avoir ni suspicion, ni fausse pudeur. Quand les choses sont claires, tout le monde est gagnant : le musée, l’entreprise, mais aussi le public qui a une offre plus large. Ces grandes expositions constituent incontestablement une remarquable occasion pour une entreprise d’accueillir ses clients tout en encourageant la production de ces évènements par les musées. Cela n’a rien à voir, bien évidemment, avec les ambitions et les missions que s’est données notre Fondation, mais la conjugaison de ces deux vecteurs de communication permet au CCF d’être un mécène loyal et je l’espère, efficace.

Le CCF a décidé de porter son mécénat sur la photographie. Pourquoi ?
Ce choix s’explique par plusieurs raisons. Tout d’abord, le lien entre notre banque et la photographie est très logique : nous nous devons de comprendre notre époque pour accompagner nos clients, et la photographie est le plus naturel instrument de témoignage sur notre époque. Ensuite, historiquement, le CCF a été dans les années 1920 le banquier des premiers producteurs d’images : Gaumont, Pathé. Nous avons donc une tradition de partenariat dans ce secteur. Autre type d’engagement, dès la fin des années 1980, nous avons confié l’illustration de nos documents institutionnels à de grands photographes : Sebastiao Salgado, Raymond Depardon, Marc Riboud, pour n’en citer que quelques-uns. Puis nous avons été le partenaire du Centre national de la photographie pendant quatre ans, ce qui nous a valu alors d’être considéré comme des pionniers. Aujourd’hui, d’autres mécènes nous ont rejoints. La Fondation CCF pour la photographie existe, quant à elle, depuis 1995. Elle s’applique à faire reconnaître de nouveaux talents, partout en France mais aussi à l’étranger, avec une exposition itinérante, l’édition de leurs premières monographies en collaboration avec Actes Sud et l’achat d’œuvres de nos lauréats. Notre collection est une résultante de l’action de la Fondation. En parallèle, le mécénat du CCF agit dans un domaine plus large. Nous avons été partenaire de l’exposition “Brassaï”, de l’exposition de la collection Roger Therond, de l’exposition “Magnum” ou encore, cette année, de l’exposition consacrée à Andreas Gursky. L’année prochaine, nous devrions être partenaire de l’exposition “Henri Cartier-Bresson” à la Bibliothèque nationale de France.

La XXIe édition de la Biennale des antiquaires ouvre ses portes le 20 septembre. Tous les deux ans, à l’automne, Paris semble redevenir la capitale du marché de l’art. Que pensez-vous de cette manifestation et comment observez-vous la place de Paris face à Londres ou New York dans ce domaine ?
C’est une très belle manifestation. Elle fait rêver. Se plonger ainsi dans l’histoire reste un moment unique. On y admire des objets magnifiques. Nous devons avoir de l’ambition pour Paris qui est déjà une des places culturelles les plus dynamiques et doit développer encore ses atouts.

Quelles expositions ont attiré votre attention récemment ?
Bien évidemment les expositions des Rencontres d’Arles, avec principalement l’exposition Koudelka et l’émouvante présentation des photos prises à New York après le 11 Septembre. Au Musée Maillol, dans l’exposition de Robert Rauschenberg, j’ai été très intéressée par la salle consacrée à Synapsis Shuffle. Cette série de panneaux agencés selon un ordre aléatoire d’une exposition à l’autre montre bien l’influence de l’environnement sur la perception et la compréhension des images. Au Musée d’Orsay, j’ai découvert les illustrations de Kupka. J’avoue avoir préféré la période qui le voit passer à la peinture. Enfin, j’ai retrouvé avec bonheur les tableaux de Bonnard dans la collection permanente du si joli Musée de l’Annonciade à Saint-Tropez.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°154 du 13 septembre 2002, avec le titre suivant : Chantal Nedjib

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