New York

L’Asia week en mal de chefs-d’œuvre

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 30 mars 2016 - 754 mots

Pour les premières sessions de ventes d’art asiatique de l’année, Christie’s et Sotheby’s ont tiré leur épingle du jeu, compte tenu d’une offre dépourvue de lots phare.

NEW YORK - Les maisons de ventes étaient dans l’expectative, ne sachant pas bien quel allait être le comportement des acheteurs asiatiques dans une économie chinoise en difficulté. Malgré tout, compte tenu de ce qui était proposé et mis en vente, le marché a tenu bon. Les deux auctioneers ont totalisé à elles deux 81,5 millions de dollars (72,3 millions d’euros), contre 110,6 millions de dollars l’an passé (sans compter la collection Hatfield Ellsworth qui avait récolté chez Christie’s 134 millions de dollars en mars 2015).
La session 2016 enregistre ainsi une baisse de 25 % par rapport à l’an dernier, mais l’explication est simple : les maisons de ventes ont manqué de lots star cette année. « Ce que cherchent les acheteurs actuellement, ce sont des trésors aux estimations raisonnables. Ils sont très sélectifs », note Caroline Schulten, directrice du département art d’Asie chez Sotheby’s Paris. Pierre Ansas, expert en arts asiatiques confirme : « Le marché, pour les objets de moyenne qualité, est au bout du rouleau. » Seulement voilà, les maisons de ventes ont peiné à trouver des chefs-d’œuvre. « S’il y avait eu un objet qui méritait de faire 10 millions, il les aurait faits, sans problème. C’est davantage la qualité des objets qui est à mettre en cause, car l’argent ne manque pas pour les très grosses pièces », souligne l’expert. Les pièces importantes arrivées sur le marché lorsqu’il était à son zénith (il y a trois ou quatre ans) et, depuis, entrées dans des collections restent pour l’instant au chaud face à l’incertitude du marché chinois.

Avec ses cinq ventes en art asiatique ancien, Sotheby’s a récolté 44,3 millions de dollars, dépassant son estimation haute fixée à 33,7 millions de dollars, avec des taux de vente tout à fait convenables, entre 70 et 80 %, un pourcentage courant dans cette catégorie. La vente de la collection de meubles chinois du révérend Richard Fabian a même obtenu 100 % de lots vendus (5,5 millions de dollars). Le lot qui a recueilli la plus forte enchère est d’ailleurs un meuble, une table en Huanguali, dynasie Qing, XVIIIe siècle, vendue 1,4 million de dollars (est. 80 000 à 120 000 euros). Mais aucun lot n’a dépassé cette somme, contrairement à l’an passé, où un sutra bouddhiste de la dynastie Ming avait atteint 14 millions de dollars. « Une vraie surprise que l’on ne peut malheureusement pas renouveler tous les ans », souligne Caroline Schulten. Les porcelaines ont également les faveurs des acheteurs. Une dame de cour Tang à glaçure sancai, provenant de la collection Taubman, a été adjugée 1,3 million de dollars.

Une vente en gants blancs

Chez Christie’s, les ventes ont totalisé 37,2 millions de dollars, dans la fourchette de l’estimation. Difficile de comparer avec l’an passé, car la maison avait récolté 159,7 millions de dollars grâce à la dispersion de l’exceptionnelle collection de Robert Hatfield Ellsworth (hors collection, le total s’élevait à 25,6 millions de dollars). Parmi les huit ventes et les nombreux lots, plus de mille au total (764 chez Sotheby’s), les résultats ont été plus inégaux, même si le taux de vente de 70 % est tout à fait honorable pour la spécialité. La vente de la collection Van der Wee de peintures himalayennes n’a pas rencontré le succès escompté, puisqu’elle a totalisé 648 500 dollars contre une estimation de 2,5 à 3,5 millions avec seulement 31 % des lots vendus. En revanche, les  peintures anciennes chinoises firent l’objet d’une vente en gants blancs, puisque tous les lots ont trouvé preneur (5,2 millions de dollars). C’est au sein de la vente de céramiques et objets d’art chinois que se trouve l’objet le plus chèrement adjugé de la semaine, un bronze doré représentant Avalokiteshvara à onze têtes, XVIIIe, vendu 2,8 millions de dollars (est. 100 000 à 150 000 dollars).

Aucune œuvre n’a dépassé les 3 millions de dollars pour cette session new-yorkaise.
En résumé, et compte tenu de l’offre dépourvue de lots star, le marché ancien semble ne pas pâtir des difficultés que rencontre l’économie chinoise, à condition que les objets soient frais sur le marché et dotés d’estimations raisonnables. Les ventes qui auront lieu à Hongkong en avril devraient confirmer la tendance, surtout au vu de la mise en vente de trois cachets de l’empereur Kangxi, dont les enchères ne démarreront pas en dessous de 6,4 millions de dollars.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°454 du 1 avril 2016, avec le titre suivant : L’Asia week en mal de chefs-d’œuvre

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