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Inauguration

Piano réinvente le Whitney Museum

Le musée d’art américain s’installe dans le Meatpacking District à New York dans un écrin signé de l’architecte Renzo Piano. L’ancien bâtiment est loué au Metropolitan Museum of Art

NEW YORK / ETATS-UNIS

Sis en lieu et place d’une usine de conditionnement de viande du Meatpacking District au sud-ouest de Manhattan, le nouveau Whitney Museum of American Art est une réussite architecturale signée Renzo Piano. Inauguré le 1er mai, le bâtiment permet au musée de doubler sa surface d’exposition et offre de vastes terrasses à tous les étages.

Le Whitney Museum of American Art conçu par Renzo Piano à New York © Photo Ed Lederman, 2015
Le Whitney Museum of American Art conçu par Renzo Piano à New York
© Whitney Museum / Photo Ed Lederman, 2015

NEW YORK - Le Whitney Museum of American Art, consacré à l’art américain des XXe et XXIe siècles, a ouvert ses portes le 1er mai dans un nouveau bâtiment conçu par Renzo Piano. Il sera resté fermé à peine six mois, le temps de son déménagment du Breuer Building.

Solide et brute, la conception architecturale rend hommage au passé industriel du quartier – un passé tout récent, d’ailleurs : le musée succédant à une usine de conditionnement de viande. Cependant, les lieux sont spacieux et lumineux, grâce aux fenêtres de grandes dimensions. Renzo Piano, l’un des architectes du Centre Pompidou, a évoqué le caractère « accueillant » du musée, en précisant qu’« on ne voit presque pas de frontière entre le bâtiment et la rue ». Le musée est situé au pied de la High Line, le parc récemment aménagé sur une ancienne voie ferrée élevée.

C’est en ayant recours à l’acier (4 000 tonnes) que les salles ont pu être construites sans pilier. Les 4 600 mètres carrés d’espace d’exposition représentent presque le double de la surface dont le musée disposait au Breuer Building, et les galeries du cinquième étage constituent désormais le plus grande espace d’exposition sans colonnes de New York. Le musée se trouvant à côté du fleuve Hudson, les galeries ont été aménagées dans les étages supérieurs en raison du risque d’inondation. Après les dégâts entraînés dans le quartier par l’ouragan Sandy en 2012, le Whitney a engagé la société d’ingénieurs WTM de Hambourg (Allemagne) pour installer un système visant à prévenir les dommages causés par les inondations. Tous les étages supérieurs disposent de terrasses, lesquelles offrent en tout 1 200 mètres carrés d’espace d’exposition supplémentaires. Les terrasses du sixième, septième et huitième étages communiquent par des escaliers pour faciliter le flux des visiteurs.

Un budget pharaonique
La construction du musée aura coûté 422 millions de dollars (386,5 millions d’euros), mais le Whitney a recueilli plus de 760 millions pour financer le nouveau bâtiment et créer un fonds de dotation. La Ville de New York a vendu le terrain au musée et a financé les travaux de façon importante (la Ville est le deuxième donateur, derrière le mécène Leonard A. Lauder, membre du conseil d’administration). Le Whitney dispose désormais d’un auditorium ainsi que d’une salle de conférences, et le musée a engagé le chef très en vue Danny Meyer pour ouvrir un restaurant au rez-de-chaussée.
« America is Hard to See » est le titre, inspiré d’un poème de Robert Frost, de l’exposition temporaire qui inaugure le nouveau bâtiment ; elle comprend plus de 600 œuvres issues de la collection permanente et signées par 400 artistes environ. Selon la conservatrice en chef, Donna De Salvo, plusieurs de ces œuvres n’ont jamais été exposées ou ne l’ont été que rarement ; elles ont été réunies pour « montrer la complexité gênante de l’art américain ». Chaque étage illustre une époque différente, mais ce regard historique est assorti d’une approche thématique : les curateurs ont ainsi dessiné vingt-trois « chapitres » à partir des préoccupations des artistes de chaque époque, comme les attentats du 11-Septembre et ou le sida. Parmi les œuvres phares figurent celles d’Alexander Calder, d’Edward Hopper, de Georgia O’Keeffe ou d’Ed Ruscha. Mais cette exposition très réussie révèle aussi des artistes peu connus liés à des mouvements artistiques engagés, décriant le lynchage ou militant pour les droits des ouvriers.

Les artistes « au cœur du musée »
Le directeur, Adam D. Weinberg, a dédié le musée aux artistes, en rappelant au public que « l’artiste est au cœur » du Whitney Museum. Effectivement, Gertrude Vanderbilt Whitney, qui a fondé le musée en 1930, était la mécène et l’amie des artistes novateurs de son temps. « Nous avons hâte de nous servir du musée pour permettre à leur art de s’épanouir », a précisé Adam Weinberg.
Le Whitney avait longtemps voulu s’agrandir dans son ancien quartier de l’Upper East Side, mais celui-ci, historique, étant protégé, le conseil d’administration a été amené à abandonner cette idée. Le Metropolitan Museum of Art louera le Breuer Building pour y monter des expositions temporaires organisées par ses départements d’art moderne et d’art contemporain. À la différence du MoMA, dont les extensions successives lui ont à chaque fois attiré les critiques pour son approche peu respectueuse du passé, le Whitney a relevé le défi de s’installer dans un quartier en cours de transformation tout en préservant son ancien bâtiment. Un pari réussi qui enrichit la ville et soutient la création artistique contemporaine.

Whitney Museum of Art

99 Gansevoort Street, New York, tél. 212 570 3600, whitney.org, tlj sauf mardi, lun.-merc.-dim. 10h30-18h, jeu.-vend.-sam. 10h30-20h. « America is Hard to See », jusqu’au 27 septembre.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°435 du 8 mai 2015, avec le titre suivant : Piano réinvente le Whitney Museum

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