Bruxelles

Une Brafa plus lente

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 11 février 2015 - 812 mots

L’année 2014 avait battu tous les records, sur le plan tant de la fréquentation que des ventes. En 2015, pour la majorité des marchands, les transactions se sont fait attendre.

BRUXELLES - La Brafa, première foire de l’année, qui s’est tenue du 24 janvier au 1er février à Bruxelles, est toujours aussi chic et bien organisée. « Nous avons eu le plus beau public que nous n’ayons jamais eu ! », s’est félicité Didier Claes, vice-président de la foire d’art et d’antiquités. Et, a ajouté Harold t’Kint de Roodenbeke, son président, « cette clientèle est à la recherche de pièces importantes ».

En effet, si les ventes ont été plus lentes par rapport à l’an passé, certains spécialistes invoquant ici la chute du franc suisse, les objets importants ont été rapidement saisis. « Les acheteurs ont sanctionné les pièces intermédiaires », a commenté un marchand. Mais la qualité des objets était bien présente, certains exposants redoublant d’effort pour montrer des pièces inédites ou de grande importance, comme à la galerie Kunstberatung (Zurich) qui proposait une œuvre de Tamara de Lempicka, Rythme (1924), chiffrée à plusieurs millions d’euros.

Sur les stands et dans les allées, Belges, Français, Néerlandais, Allemands et Russes se côtoyaient, dans une ambiance décontractée. Très peu d’Américains et encore moins d’Asiatiques avaient fait le voyage, la Belgique n’étant pas encore leur destination de prédilection.

Équilibre entre spécialités
Selon Benjamin Steinitz (Paris), « l’équilibre entre les différentes spécialités était meilleur cette année. Il y avait moins d’art contemporain ». L’antiquaire avait apporté des objets de premier choix, jamais montrés auparavant, telle une pendule aux magots en vernis Martin (450 000 euros) et une pendule de cartonnier, L’Amour triomphant du Temps, par André Charles Boulle (750 000 euros), pas vue sur le marché depuis 1965. Côté mobilier ancien toujours, Olivier Delvaille (Paris) a réalisé une quinzaine de ventes « mais ce sont des objets moins importants que d’habitude ». La galerie Berger (Beaune) a vendu une douzaine de pièces « dont un bureau plat de l’ébéniste René Dubois à un jeune homme de 26 ans ! », a révélé fièrement Alain Berger. Un ensemble de lambris en bois doré composé de deux consoles surmontées de leur miroir en trumeau et d’un miroir de cheminée, époque Louis XV, vers 1760, ancienne collection du marquis de Gouffier, château d’Heilly (Somme), n’a pas échappé à l’œil averti d’un marchand qui l’a réservé. Il avait été attiré par la hauteur inhabituelle des glaces au mercure, « réservée aux glaces de Versailles », a expliqué l’antiquaire.

L’archéologie était bien représentée. Un connaisseur du marché a considéré qu’« en termes de niveau, la Brafa est l’équivalent de Tefaf [la foire de Maastricht] dans cette discipline ». Selon la galerie Phoenix Ancient Art (Genève), qui n’a pas vendu à hauteur de ses attentes, les achats sont encore spontanés entre 10 000 et 40 000 euros mais ils nécessitent un temps de réflexion au-delà. Elle exposait une table gréco-romaine en bronze incrusté, unique en son genre, ancienne propriété de la famille Grassi en Italie. L’objet a été réservé par un musée américain, pour un prix à 7 chiffres. La galerie Harmakhis (Bruxelles) montrait une statue funéraire de la VIe dynastie en bois de sycomore (affichée en dessous du million).

L’art tribal très représenté
En matière d’art tribal, la Brafa reste la foire généraliste qui regroupe le plus grand nombre de marchands, soit huit en tout. Dans cette discipline, les ventes se sont bien déroulées, pour la plupart en début de salon. Chez Pierre Dartevelle (Bruxelles), une maternité Sénoufo, élevée au rang de déesse créatrice de l’univers – un bijou – a trouvé preneur dès les premiers jours. D’une grande force, elle a été plusieurs fois reproduite, notamment dans le catalogue de l’exposition sur l’art Sénufo organisée par le Museum Rietberg à Zurich en 1988. Yann Ferrandin (Paris) a réalisé de nombreuses ventes, parmi lesquelles un groupe d’objets Eskimo, un masque Bété, République de Côte d’Ivoire, XIXe siècle – une œuvre de la même main est conservée au Metropolitan Museum of Art à New York. Didier Claes a cédé tous ses objets importants, dont une plaque provenant d’un palais du Bénin, fin du XVIe siècle, ornée d’une figure de dignitaire, passée entre les mains de Charles Ratton (1 million d’euros).

Concernant les œuvres du XXe siècle, le dessin original réalisé par Hergé en 1942 pour L’Étoile mystérieuse, album des « Aventures de Tintin », a été emporté par la galerie bruxelloise Huberty-Breyne (ex-Petits Papiers) pour 2,5 millions d’euros. Xavier Eeckhout (Paris) s’est départi de 18 pièces sur les 27 présentées parmi lesquelles Cerf, vers 1930, d’Auguste Trémont (autour de 40 000 euros). Harold t’Kint de Roodenbeke, a cédé une œuvre de Simon Hantaï issue de la série des pliages (autour de 300 000 euros), tandis que Stern Pissarro a vendu une peinture de Jean Dubuffet à la Fondation du même nom à Paris.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°429 du 13 février 2015, avec le titre suivant : Une Brafa plus lente

Tous les articles dans Marché

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque