Art Basel fait bouger ses lignes

Par Frédéric Bonnet · Le Journal des Arts

Le 5 juin 2013 - 774 mots

L’année 2013 est signe d’un net changement de visage pour la foire suisse, dont la partie historique s’amenuise au profit du contemporain.

Qui a dit que les bonnes recettes devaient rester gravées dans le marbre ? Certainement pas les dirigeants successifs d’Art Basel, lesquels ont toujours saisi non seulement l’importance mais aussi la nécessité de faire évoluer une formule même gagnante, manière d’entretenir le désir à travers la nouveauté : un classique du marketing en somme.

Alors que 2012 avait vu la manifestation suisse évoluer seulement à la marge, le cru 2013, qui réunit 304 exposants, soit deux de moins que l’année dernière, apparaît annonciateur d’un mouvement qui pourrait/devrait avoir un impact plus durable sur l’image du salon, en taille tout d’abord. Achevé, l’édifice des architectes Herzog & de Meuron érigé sur la place de la foire (Messeplatz) s’inscrit en continuité du hall 1. Y est installé un espace consacré aux « Magazines » – lequel quitte le hall 2 en y libérant de la place – de même que les « Conversations » comme les jeunes galeries de « Statements », toujours largement renouvelées : parmi les vingt-quatre exposants, treize sont de nouveaux entrants, ainsi Jessica Silverman (San Francisco) ou Gaudel de Stampa (Paris), mais aussi des enseignes en provenance de Séoul (One and J.) ou des Philippines (Silverlens, Makati City). Le hall 1 se voit ainsi entièrement dévolu à « Unlimited », qui s’agrandit avec des pièces au format hors norme dont le nombre passe de 60 à 79, ce qui n’est pas rien du point de vue de la surface.

Emplacements et remaniements
Le hall 2 « historique » de la foire continuera d’accueillir la section générale et, au sein de « Feature », les projets spécialement créés, au nombre de 24 également. Sont de la partie Parra & Romero (Madrid) avec Luis Camnitzer, Cherry and Martin (Los Angeles) qui n’en finissent plus de surfer sur la vague d’un retour du Robert Heinecken, ou Plan B (Cluj, Berlin) avec le formidable Ciprian Muresan.
Si la section générale ne connaît, avec Howard Greenberg (New York), qu’un seul impétrant au salon, elle s’enrichit de quelques transfuges venus d’autres sections tels Jocelyn Wolff (Paris), Guido W. Baudach (Berlin) ou Alison Jacques (Londres). Pas de révolution dans le contenu donc, mais certainement sur la forme car les lignes vont bouger… et pas qu’un peu.

Bruno Bischofberger (Zurich), Krugier & Cie (Genève) et Margo Leavin (Los Angeles) ayant tiré leur révérence, se met en place un effet domino dans les changement d’emplacements. Ainsi White Cube (Londres), Metro Pictures (New York) et Lisson (Londres) rejoignent-ils le rez-de-chaussée ; le transfert avait été tenté il y a quelques années par Yvon Lambert (Paris) avant que celui-ci ne réintègre très vite l’étage, qu’il estimait être plus contemporain. Un avis peut-être à reconsidérer car ces remaniements au rez-de-chaussée sont la marque d’une « contemporanéisation » accrue de la foire, conséquence logique d’une raréfaction progressive mais inéluctable de l’offre en art moderne et en artistes historiques de la seconde moitié du XXe siècle, autre facteur à prendre en compte dans l’évolution progressive du salon. Car si cette catégorie d’œuvres n’est pas vouée à une disparition complète, elle s’amenuise, y compris concernant les pièces importantes d’après guerre. Si l’on ne manquera probablement jamais de Warhol, trouver par exemple un grand Kline ou un Clyfford Still relève d’une autre paire de manches.

Conséquence de ces mouvements : des dizaines de galeries vont changer de localisation ; certaines vont passer en première ligne et voir croître leur surface – ce qui devrait les contraindre à se montrer plus ambitieuses –, d’autres vont récupérer des stands en angle, propices à exposer de la sculpture. Il n’est pas sûr que les habitués y retrouvent tous leurs petits, ce qui est plutôt salutaire tant ce nouveau plan pourrait être synonyme d’un rafraîchissement important de la physionomie et de l’atmosphère de la foire.

Un rafraîchissement qui passe aussi par une refonte de la communication, les appellations « Art Unlimited », « Art Parcours », etc., devenant tout simplement « Unlimited » et « Parcours ». Ce « dépoussiérage » pourrait sonner comme un gadget mais n’en traduit pas moins une profonde volonté d’un renouvellement d’image. Marketing, quand tu nous tiens !

ART BASEL 2013

Directeur : Marc Spiegler

Nombre d’exposants : 304

Tarif du stand (section générale) : 669 CHF (env. 536 €) le mètre carré

Nombre de visiteurs en 2012 : 65 000

ART BASEL

Du 13 au 16 juin, Messe Basel, halls 1 et 2, Messeplatz, Bâle (Suisse), www.artbasel.com, tlj 11h-19h.

Légende photo

Art Basel 2013, Unlimited, Lygia Clark / Jacques - MCH Messe Schweiz (Basel) AG - © Photo Art Basel

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°393 du 7 juin 2013, avec le titre suivant : Art Basel fait bouger ses lignes

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