Ventes aux enchères

Focus : Edvard Munch « Le Cri »

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 9 mai 2012 - 516 mots

Sotheby’s a réussi l’exploit, le 2 mai à New York, de vendre en douze minutes la célèbre œuvre d’Edvard Munch, Le Cri (1895), pour 119,9 millions de dollars (91 millions d’euros), à l’issue d’une bataille d’enchères lancée par huit enchérisseurs.

L’acquéreur ne s’est pas fait connaître. C’est un prix record pour une œuvre d’art en vente publique, jusqu’alors détenu par un tableau de Pablo Picasso, Nu au plateau de sculpteur (1932), lequel avait été adjugé 106,4 millions de dollars, le 4 mai 2010 à New York chez Christie’s. Pour la première fois de l’histoire des enchères, le marteau est tombé au-delà de 100 millions de dollars (107 millions exactement).

Le 21 février, lorsque la maison de ventes annonce publiquement disposer du Cri, elle évoque une mise à prix à 80 millions de dollars ! À un montant aussi haut, difficile pour un acquéreur  d’évaluer le montant d’une plus-value possible à moyen terme, ce à quoi pense tout très riche amateur d’art généralement doublé d’un homme d’affaires. Mais, stratégie marketing à l’appui, Sotheby’s a deux mois pour convaincre. Parler de « chef-d’œuvre », d’« icône », d’« image de la modernité », voire d’« image la plus connue dans l’histoire de l’art et la culture populaire après Mona Lisa [La Joconde] », suffit à faire oublier son point faible : il s’agit d’un pastel sur carton, non d’une huile sur toile.

Le sujet, particulièrement fort, montre un homme en pleine crise d’angoisse existentielle. Il existe trois autres Cri, tous conservés à Oslo (Norvège) dans des musées. Pour ajouter à la légende : deux d’entre eux furent volés, en 1994 et 2004, puis retrouvés quelque temps plus tard. Celui de Sotheby’s est donc le seul existant en mains privées et « le plus coloré et le plus vibrant », dixit Sotheby’s. Sa provenance est connue : l’œuvre est la propriété de l’homme d’affaires norvégien Peter Olsen dont le père, qui l’acquit vers 1937, était un ami proche, mécène et voisin de Munch. Les experts de Sotheby’s vont directement porter « l’importance et la rareté d’une telle icône » au firmament des huit œuvres majeures les plus chères, soit « ayant dépassé les 80 millions de dollars aux enchères ».

Outre le Picasso cité plus haut, il s’agit de L’Homme qui marche I (1961), bronze d’Alberto Giacometti ; de deux autres toiles de Picasso ; du Portrait d’Adèle Bloch-Bauer II (1912) de Gustav Klimt ; du Triptych (1976) de Francis Bacon ; du Portrait du docteur Gachet (1890) de Vincent van Gogh et du Bassin aux nymphéas (1919) de Claude Monet. La maison de ventes rappelle, pour relativiser, que ces sommes restent inférieures au montant des transactions privées ayant eu lieu pour le tableau Les Joueurs de cartes de Paul Cézanne, lequel fut vendu 250 millions de dollars au Qatar en 2011 ou pour  le tableau abstrait de Jackson Pollock, qui aurait été cédé au financier mexicain David Martinez pour 140 millions de dollars en 2006. Ce Munch, c’est une affaire en somme !

- Adjugé dollars 119 922 50O (FRAIS COMPRIS), le 2 mai, New York
- Sotheby’s

EDVARD MUNCH
(1863-1944)
- Titre : « Le Cri »
- Signature : « E. Munch »
- Date d’exécution : 1895
- Technique : pastel sur carton, dans son cadre original
- Dimensions : 79 x 59 cm
- Provenance : acquis par le Norvégien Thomas Olsen vers 1937, puis par descendance
- Expert : Simon Shaw
- Estimation (hors frais) : 80 à 100 millions de $ (60 à 75 millions d’euros)
- Adjudication (frais compris): 119,9 millions de $ (91 millions d’euros)

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°369 du 11 mai 2012, avec le titre suivant : Focus : Edvard Munch « Le Cri »

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