Viêt-nam Now !

Dessin, peinture, sculpture, photographie…

Par Le Journal des Arts · Le Journal des Arts

Le 13 mars 1998 - 754 mots

De la peinture aux marionnettes sur eau, en passant par la photographie, le cinéma, les arts décoratifs, la Ville de Paris braque pendant deux mois le projecteur sur la culture vietnamienne en organisant expositions, spectacles et conférences. En voici une sélection.

PARIS. De tous les pays de l’Asie du Sud-Est, le Viêt-nam est l’un de ceux qui a le plus de liens historiques avec la France. Aujourd’hui, une importante communauté vietnamienne vit dans notre pays, tandis que de nombreux touristes français, depuis la politique d’ouverture du “doi moi”, peuvent se rendre dans l’un des derniers bastions du communisme. Alors que commissaires-priseurs et marchands essayent de dynamiser un marché de l’art vietnamien, comme l’ont montré notamment deux ventes aux enchères à Paris, les institutions publiques – hormis le Musée de Saint-Brieuc l’été dernier – ont été peu actives. La Ville de Paris, en partenariat avec le ministère des Affaires étrangères (Afaa), prend l’initiative d’une vaste mosaïque. Celle-ci juxtapose de multiples expressions, du traditionnel au contemporain, d’artistes autochtones, enfants d’émigrés ou encore occidentaux, à travers lesquelles le visiteur, de découverte en découverte, devra faire son miel. “Le Viêt-nam est encore trop identifié à la guerre, constate Em­ma­nuel Daydé, commissaire général et directeur adjoint des Affaires culturelles de la Ville de Paris. Nous voulons montrer un pays moderne”.

L’École des beaux-arts de Hanoi
Dans cette manifestation, “Paris-Hanoi-Saigon, l’aventure de l’art moderne au Viêt-nam” se présente comme l’exposition phare en regroupant au Pavillon des Arts 120 œuvres : dessins, peintures et sculptures. La peinture prend son essor à partir de 1925, année où s’ouvre, sous l’impulsion du peintre Victor Tardieu, l’École des beaux-arts de Hanoi, pur produit de la colonisation, calqué sur les Beaux-Arts de Paris. Une telle institution n’a en effet pas d’antécédent en Indochine, ce qui fait dire à l’historien Thai Ba Van : “Il faut reconnaître que l’art moderne est né d’une situation imposée, mais que c’est bien le point de départ de l’art moderne au Viêt-nam”. L’école existe toujours. Elle n’a fermé que temporairement en 1941 lors du coup de force japonais, a déménagé à deux reprises lors de la résistance contre l’occupant français et, pour la première fois sous direction vietnamienne, était vouée à servir l’idéologie révolutionnaire. Aujourd’hui, même si l’abstraction y a droit de cité, les modèles esthétiques restent largement inspirés du réalisme socialiste.
La première section réunit les professeurs français et les élèves issus des premières promotions, comme Le Pho, Nguyen Gia Tri, Nam Son, où se mêlent fortement identité locale et influences occidentales. Puis l’exposition s’attache aux “quatre piliers du temple”, Bui Xan Phai, Dong Bich Lien, Nguyen Sang et Nguyen Tu Nghiem, figures tutélaires qui ont marqué la génération suivante. Les trois premiers sont décédés en 1988, le quatrième reconnaît “admirer beaucoup Picasso, mais tirer avant tout son inspiration de la culture populaire”. Enfin, la dernière étape du parcours offrira une sélection des créations actuelles.
Autre volet important de cette “saison”, la photographie. Le patriarche Vo An Ninh, 90 ans, exposera une quinzaine de tirages à côté de ceux, aux couleurs sépia, de Xavier Lambours, qui les a conçus comme “un voyage dans le temps d’avant le colonialisme” (Fnac Forum des Halles). On retrouvera Lambours, avec Raymond Depardon et Sebastião Salgado, dans le cadre des “Regards croisés du Viêt-nam”, organisés par le designer Christian Duc (Maison de l’Indochine). Les travaux d’une vingtaine de photographes, tant de Hanoi que de Hô Chi Minh-Ville, seront accrochés à l’Espace photographique des Hal­les. Rémy Gastambide, amérasien, y montrera sa série “Pous­sières de vie”, portraits de ces métis de la guerre – comme lui – et aujourd’hui parias de la paix. Son travail est “un combat contre l’oubli”, “une quête de l’identité et des racines”. Celui de Jean-Baptiste Huynh, né en France, est autre. Lauréat Villa Médicis hors les murs pour le Viêt-nam (Afaa) et du Prix Kodak (mention spéciale), il porte un regard intemporel et poétique en associant des images-symboles de ciels et de corps. En ouvrant un miroir entre le céleste et la chair, l’imaginaire et le tangible, il renouvelle une vision de sujets ré­currents : ciels étoilés, nuages, frag­ments de corps, mains, vi­sages… L’Hôtel d’Albret, siège de la Direction des Affaires culturelles de la Ville de Paris, sera l’écrin d’“Intime Infini”, objet également d’un livre aux éditions Actes Sud (114 p., 250 F).

PRINTEMPS VIETNAMIEN : “Paris-Hanoi-Saigon, l’aventure de l’art moderne au Viêt-nam�?. “Regards croisés du Viêt-nam�?. “À la découverte de la photographie vietnamienne�?. “Intime Infini�?… Paris, différents lieux, du 20 mars à la mi-mai. Renseignements tél. 01 42 76 65 68.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°56 du 13 mars 1998, avec le titre suivant : Viêt-nam Now !

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