Triennale Turin : aller simple pour Saturne

Par Bénédicte Ramade · L'ŒIL

Le 16 décembre 2008 - 371 mots

Après avoir placé sa première édition sous l’égide truculente de Pantagruel, la triennale de Turin réitère le principe de tutelle.

Elle est cette fois-ci mythologique avec Saturne, doublée d’une envolée cosmique car il s’agit aussi pour le commissaire allemand Daniel Birnbaum de projeter l’imaginaire vers les satellites de cette planète, les cinquante lunes de Saturne.
Comme on peut aisément l’imaginer, la manifestation n’est donc pas placée sous le signe de l’humour et de la folle détente. En ces heures sombres de crise financière et de récession, il n’est pas pour autant question de surjouer la morosité. Saturne, comme aime à le rappeler Birnbaum, n’est pas que la figure de la mélancolie, de la dépression et de la folie qui poussa le personnage à dévorer ses propres enfants. Il fut longtemps célébré comme dieu de l’inspiration, de l’écriture et, plus généralement, de la quête intellectuelle. L’ambiguïté de Saturne sied parfaitement à notre époque et à une pratique contemporaine relativement schizophrène.
La démonstration marquée par une profonde nostalgie formelle et une mélancolie envahissante se déploie en trois actes depuis le Castello di Rivoli, la production astrale d’Olafur Eliasson (The Sun has no money), et un premier jet collectif, jusqu’à la Fondation Sandretto à Turin, chargée d’une monographie de Paul Chan, en passant par la Promotrice delle Belle Arti pour une troisième partie, résolument collective.
Si Daniel Birnbaum a déployé ses amitiés artistiques de Tacita Dean à Tatiana Trouvé jusqu’à Loris Gréaud, il ne s’est pas privé d’une démarche résolument prospective et italienne. Le point commun pourrait être celui de la représentation photographique et vidéo, médias de prédilection dans l’expression d’une subjectivité sombre, anxieuse et contemplative.
Au milieu de ce romantisme de l’érosion, quelques trublions viennent toutefois perturber la donne. Les sculptures absurdes de Lara Favaretto, les formes baroques et sourdes de Diego Perrone ou les installations lumineuses de l’Américain Spencer Finch, diversifient heureusement l’expérience. Birnbaum insiste, Saturne n’est pas que la figure complexe de la dépression et du tourment, mais bien le symbole de la transformation et du défi. Ça promet pour la Biennale de Venise dont il sera le prochain directeur.

A voir

Triennale de Turin, Castello di Rivoli, Fondation Sandretto et Promotrice delle Belle Arti, Turin (Italie), www.torinotriennale.it, jusqu’au 1er février 2009.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°609 du 1 janvier 2009, avec le titre suivant : Triennale Turin : aller simple pour Saturne

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