Todeschini

Le genre tragi-comique

Par Marie Maertens · L'ŒIL

Le 1 décembre 2005 - 520 mots

Le thème de l’excision de la pierre de folie est sans conteste un classique de la scène de genre comique et réaliste au XVIIe siècle.

On sait peu de choses de Giacomo Francesco Cipper dit aussi Il Todeschini et pourtant ses toiles ont traversé le temps. D’origine autrichienne, il est actif à Milan de 1696 à 1736. Son œuvre se nourrit d’influences diverses mêlant les recherches du Caravage et d’Annibale Carrache à la pâte nordique de Bruegel, Bosch ou Frans Hals. On y reconnaît aussi l’influence des bambochades, des tableaux de petits formats dans lesquels fourmillent des personnages dans des tavernes, des foires.
L’engouement pour la peinture de genre à cette époque est significatif d’une période de transition entre deux époques. Celle du passage du baroque italien et du classicisme français vers l’esprit des Lumières qui se diffuse dans toute l’Europe dès la fin du xviie siècle et se penche sur les différences de couches sociales. Il Todeschini est passé maître dans ce type de scènes, qu’il enrichit de son goût pour la représentation du rire et les compositions théâtralisées.

Un courant naturaliste
Excellant dans les scènes populaires, Il Todeschini s’inscrit dans le courant naturaliste lombard du XVIIe et du début du XVIIIe siècle, qui dépeint les gens de condition humble dans des activités quotidiennes ou anodines. Si la scène de genre apparaît au XVIe siècle avec la peinture de Bruegel, elle se déploie au XVIIe siècle en « grandeur nature », impliquant davantage le spectateur.
Les figures du Todeschini donnent le sentiment d’être saisies sur le vif. À l’incongruité de la scène se mêle un souci scrupuleux de rendre la véracité du « petit peuple ». Les visages semblent taillés à la serpe et marqués de rides ou de rictus, à la limite de la caricature. Les bouches sont édentées, les vêtements  soigneusement déchirés et rapiécés.

La pierre de folie
La lumière toute caravagesque et la composition élaborée – le doigt du jeune garçon, le regard de la mère dénudée et celui de la vieille femme à la lunette – mènent l’œil du spectateur vers le sujet principal : l’extraction de la pierre.
Cette pratique, employée jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, résultait d’une croyance populaire insinuant que la folie était causée par la présence d’une pierre dans la tête. De nombreux peintres, comme Jérôme Bosch ou Bruegel l’Ancien, l’ont tournée en dérision, se moquant de la crédulité du malade et de la tromperie du soi-disant guérisseur. La scène de genre prend ainsi une connotation morale. Il Todeschini oppose le bien et le mal, l’innocent face au malhonnête homme.
La noblesse milanaise était friande de ces représentations. Si on ne peut leur assigner avec certitude un contenu social, les œuvres du Todeschini portent néanmoins en germe les idéaux de la génération des Lumières et exerceront une influence sur la peinture réaliste du XIXe siècle.

Biographie

La vie du Todeschini reste encore très peu connue. 1664 Naissance à Feldkirch en Autriche. 1696 Présence attestée à Milan. 1700/1705 Date probable de la réalisation de L’Excision de la pierre de folie. 1736 Décès à Milan. 1923 Date présumée de l’entrée de L’Excision de la pierre de folie au musée Malraux.

Autour de l’exposition

Informations pratiques L’exposition « Autour de Giacomo Francesco Cipper, dit Il Todeschini (1664-1736) : Gens d’Italie au xviie et au xviiie siècles » se tient jusqu’au 8 janvier 2006, tous les jours de 10 h à 12 h et de 14 h à 18 h, fermé le mardi. Tarif : 3 €, gratuit pour les - de 16 ans. Musée des Beaux-Arts, Reims (51), 8 rue Chanzy, tél. 03 26 47 28 44.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°575 du 1 décembre 2005, avec le titre suivant : Todeschini

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