Thomas Struth, des faces aux fleurs

L'ŒIL

Le 1 février 1999 - 342 mots

Depuis la fin des années 80, Thomas Struth est considéré comme l’une des figures majeures de la photographie contemporaine. Cette première rétrospective européenne constitue donc un événement d’importance. Après le Carré d’Art de Nîmes et le Stedelijk Museum d’Amsterdam, la voici désormais à Paris. Ses premières photographies en noir et blanc dressaient l’inventaire morphologique de quelques centres urbains avec leurs strates historiques et leur propre rationalité. Cette nouvelle objectivité, de l’aveu même de Thomas Struth, témoignait des modes de vie de nos sociétés désormais troublées par l’histoire pesante de ce siècle. Très tôt, cet ancien élève de Gerhard Richter et des Becher, avait découvert combien l’image photographique pouvait aussi présenter une information objective tout en laissant à son auteur toute latitude pour restituer sa propre expérience. Face à la neutralité d’un point de vue documentaire, la subjectivité de Thomas Struth transparaissait grâce au savant montage des photographies dans l’espace d’exposition. Cette voie étroite, ce passage entre la complexité du visible et l’incertitude de l’expérience, allait aboutir à la beauté lucide des séries de cette exposition. Dès les « portraits » en couleur (des personnes seules ou en groupe), Thomas Struth s’interroge sur la question de l’identité, que celle-ci soit celle d’un personnage ou d’une communauté. Dans chacune de ces photographies, un ou plusieurs êtres singuliers apparaissent. Ils sont là, face à nous, figés dans leur singularité par la rigueur de la prise de vue. Mais autour, les objets, l’espace, l’environnement parlent. Ils parlent d’une autre histoire. Celle de la construction de ces identités, souvent forgées par une histoire orientée idéologiquement. Plus loin, des photographies de fleurs aux couleurs chatoyantes peuvent donc passer pour un contrepoint lyrique à la froide neutralité des images plus anciennes. Loin d’être une simple taxinomie, ces photographies proposent des formes concrètes qui enchantent par la délicatesse de leur beauté périssable. Ces fleurs renvoient au pouvoir absolu des cycles naturels : la vie, la mort, thème récurrent chez cet artiste allemand à la sensibilité exacerbée.

Centre national de la Photographie, jusqu’au 15 mars, cat. Schimer-Mosel, 144 p., 111 ill.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°503 du 1 février 1999, avec le titre suivant : Thomas Struth, des faces aux fleurs

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