Paris-8e

Souvent Lune varie

Grand Palais - Jusqu’au 22 juillet 2019

Par Stéphanie Lemoine · L'ŒIL

Le 21 mai 2019 - 324 mots

Après le Louisiana Museum (Danemark), le Grand Palais commémore à son tour les premiers pas de l’homme sur la Lune, il y a cinquante ans, avec l’exposition « Lune ».

Celle-ci évacue pourtant très vite l’événement lui-même pour adopter une perspective et une chronologie infiniment plus vastes – de la curiosité scientifique à l’allégorie, des antiquités égyptiennes et gréco-romaines à l’art contemporain. Évoquée dans la première salle via un ensemble de photographies et d’objets, la mission Apollo 11 constitue ainsi la portion congrue de l’accrochage : lui sont d’emblée associées des œuvres contemporaines soucieuses d’en déconstruire la mise en scène politique, et des œuvres plus anciennes (films de Georges Méliès ou de Fritz Lang, albums d’Hergé…) affranchies de tout réalisme scientifique. Alexia Fabre et Philippe Malgouyres, les deux commissaires de l’exposition, ont en effet opté pour un parcours thématique « à rebours », qui promène le visiteur « du voyage réel aux voyages imaginaires », de l’événement collectif au compagnonnage intime. « Lune » glisse ainsi peu à peu vers l’allégorie, le rêve et la poésie (des poèmes sont d’ailleurs placés en regard des clairs de lune présentés dans la dernière salle), au risque de négliger ce qui fait la spécificité des regards artistiques contemporains sur la Lune. Au gré d’une scénographie tour à tour classique et audacieuse, baignée d’ombre et de lumière, l’exposition cherche plutôt à cerner la diversité, sinon l’ambivalence, des représentations du satellite terrestre depuis l’Antiquité. D’où un effet « kaléidoscope » assumé : aux cartographies réalisées à partir du XVIIe siècle d’après observation à l’œil nu ou à la lunette, succèdent les avatars mythologiques de la Lune et ses diverses personnifications depuis Hécate, déesse aux trois visages ; aux calendriers lunaires font face les allégories de l’inconstance féminine et les évocations de l’inconscient, la sorcellerie et la mort ; au désordre, la contemplation apaisée d’un paysage au clair de lune. En délaissant la commémoration, « Lune » s’affirme ainsi comme un plaidoyer en faveur de l’irrationnel et de l’imagination, non sans mérite.

« Lune : du voyage réel aux voyages imaginaires »,
Grand Palais, galeries nationales, square Jean-Perrin, Paris-8e, www.grandpalais.fr

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°724 du 1 juin 2019, avec le titre suivant : Souvent Lune varie

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque