Quatre œuvres pour cerner l’identité phénicienne

Par Bérénice Geoffroy-Schneiter · L'ŒIL

Le 20 décembre 2007 - 402 mots

Dea Gravida, vers 700 av. J.-C. (terre cuite).
Destinées à un usage funéraire, votif ou cultuel, d’innombrables statuettes en terre cuite ont été découvertes sur tout le pourtour méditerranéen, véritable signature de l’identité phénicienne. Nues ou vêtues, debout ou assises sur un trône, les mains sous les seins ou brandissant des offrandes, parfois même le ventre enflé trahissant un état de grossesse, elles incarnent avec vigueur les forces fécondantes de l’univers.
Sur cet émouvant exemplaire d’origine sidonienne, cette déesse de la fertilité est, semble-t-il, sur le point d’accoucher : sans aucun souci de réalisme, un enfant déjà chaussé surgit dessous sa longue robe !

Dame à la fenêtre, VIIIe s. av. J.-C. (ivoire).
Véritable « Joconde de l’art phénicien », cette énigmatique « Dame à la fenêtre » a fait couler beaucoup d’encre ! Faut-il reconnaître en elle l’une de ces prostituées sacrées interpellant les passants derrière l’encadrement de sa balustrade ?
Sans doute liée au culte de la déesse Astarté (que les Grecs assimileront à Aphrodite), cette très belle plaquette finement ciselée ornait, à l’origine, le précieux meuble d’un palais assyrien...

Stèle dite « d’Amrit  » ou de « Shadrafa », IXe-VIIIe av. J.-C. (calcaire).
Chaque cité phénicienne possède son dieu tutélaire, considéré comme le « premier roi », le fondateur, le « souverain exemplaire ».
On décèle sur cette stèle votive conservée au Louvre les multiples influences orientales dont s’est nourrie cette représentation, dans laquelle on s’accorde à reconnaître le dieu guérisseur Shadrafa. Vêtu d’un pagne « à l’égyptienne », ce dernier s’avance de profil en brandissant un lionceau, symbole de la lutte contre les forces du mal.
Dans la partie inférieure de la stèle, un autre fauve, son animal attribut, franchit des montagnes symbolisées par des écailles.  

Le cippe de Malte, IIe siècle av. J.-C. (calcaire).
Dédiée au dieu Melqart, le dieu protecteur de la cité phénicienne de Tyr, cette petite colonne servant d’ex-voto funéraire porte, sur sa base, l’inscription bilingue (en grec et en phénicien) qui a permis à l’abbé Barthélémy de déchiffrer, en 1758, l’alphabet phénicien.
Se composant de vingt-deux caractères correspondant tous à des consonnes, se traçant de droite à gauche, ce dernier servira à écrire l’araméen, l’hébreu, le palmyrénien (d’où dérive l’arabe), mais aussi le grec grâce à l’introduction de voyelles.
Ironie du sort, si de nombreux documents administratifs et religieux ont été découverts sur des sarcophages ou des stèles, il ne subsiste aucun témoignage littéraire rédigé en phénicien !

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°598 du 1 janvier 2008, avec le titre suivant : Quatre œuvres pour cerner l’identité phénicienne

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