Musée Condé, château de Chantilly - Chantilly (60)

Quand Chantilly singeait l’Extrême-Orient

Jusqu’au 1er janvier 2012

Par Bertrand Dumas · L'ŒIL

Le 12 octobre 2011 - 393 mots

Le singe et le dragon sont les emblèmes choisis par le château de Chantilly pour évoquer une part méconnue de son histoire et de son rôle dans la découverte et l’influence des arts d’Extrême-Orient sur les arts décoratifs français de la première moitié du XVIIIe siècle.

Ceux-ci tirèrent profit de la curiosité et de la persévérance du seigneur des lieux, le duc de Bourbon, prince de Condé (1692-1740) qui s’était entiché des arts de la Chine et du Japon, au point de vouloir les imiter. Pour ce faire, il créa sur son domaine trois manufactures, de porcelaines, de laques et d’indiennes (tissus peints ou imprimés), dont les créations somptueuses rivalisaient avec les modèles originaux que comptait la collection du prince, mise à disposition de ses artisans.
 
L’un d’eux, Jean-Antoine Fraisse, responsable de la manufacture d’indiennes, copia les motifs japonais dit kakiemon et les dessins des indiennes qu’il réunit dans son Livre de desseins chinois (1735), qui servit de répertoire iconographique aux porcelainiers du duc. Ceux-ci réalisèrent à partir de 1735 de la vaisselle fine et des objets décoratifs de qualité comparable aux plus belles pièces contemporaines de Chine et du Japon. Un des grands mérites de cette exposition est de permettre la comparaison entre les pièces françaises et leurs modèles asiatiques. Si certains ouvrages se confondent aux œuvres sources, d’autres se distinguent par leurs couleurs et leurs formes adaptées aux usages européens. 

Sous couvert du mécénat princier, pointent des enjeux politiques et économiques. Afin d’éviter les importations coûteuses, Condé décida de percer le secret de la porcelaine dure dont la blancheur résulte du kaolin, argile blanche, dont les gisements ne furent découverts en France qu’à la fin du siècle. Pour relever le défi de l’or blanc, il débaucha de la manufacture de Saint-Cloud le porcelainier Cicaire Cirou qui réalisa, sans le précieux ingrédient, des prouesses de formes et de pureté, qu’il ne cessa de perfectionner. Le duc, chimiste à ses heures, prit part aux expériences. Une collaboration résumée, non sans humour, sur les boiseries peintes de la Grande Singerie restaurée, où le collectionneur frénétique apparaît entouré de ses trésors exotiques et de deux singes artistes, dont l’un décore un vase de porcelaine, et l’autre dessine sur une toile d’indienne.

« Singes et Dragons. La Chine et le Japon à Chantilly au XVIIIe siècle »

Musée Condé, château de Chantilly(60), www.domainedechantilly.com, jusqu’au 1er janv.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°640 du 1 novembre 2011, avec le titre suivant : Quand Chantilly singeait l’Extrême-Orient

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