Picasso sur les planches

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 1 mars 1999 - 288 mots

Touche-à-tout de génie, Picasso s’en est pris au théâtre avec d’autant plus d’aisance qu’il a toujours considéré que la peinture entretenait avec ce dernier une fraternelle complicité. La façon dont le peintre a « joué » et « mis en scène » quelques-uns des référents magistraux de la peinture suffit à le signaler. De Parade (1917) à Mercure (1924), Picasso n’a pas manqué de dire son intérêt pour l’art du ballet (L’Œil n°494) et il a fait sienne très tôt la dimension du spectacle. On le lui a d’ailleurs souvent reproché comme s’il n’était pas de la nature même de l’artiste d’être aussi en représentation. C’est à l’invitation de Pierre Blanchar, figure marquante du cinéma et du théâtre des années 30-50, que Picasso s’en est pris en 1947 à Œdipe-Roi. Comme s’il lui fallait bien un jour se coltiner les classiques, lui qui en était le plus grand de son siècle. Si la collaboration entre le deux hommes ne fut pas toujours sur la même longueur d’onde – loin s’en faut ! –, elle a été l’occasion pour le peintre de produire de nombreux dessins de décors et de costumes dont la légèreté de trait le dispute à une intensité sans égal. Le théâtre étant essentiellement un art d’expression, la structure oculaire du décor fait écho à la qualité masquée des figures. Créon, Œdipe, Jocaste et Tirésias se trouvent partager le même schéma graphique de base, lequel est très proche des figures céramiques qui préoccupent dans le même temps l’artiste, et les décors présentent cette même simplification d’espace qui caractérise l’art d’un Cocteau.
Une nouvelle fois, le génie de Picasso y est tout entier condensé dans le trait.

ANTIBES, Musée Picasso, jusqu’au 21 mars, cat. RMN, 70 F.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°504 du 1 mars 1999, avec le titre suivant : Picasso sur les planches

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