Initiation

Macho macho men

Le Musée Dapper expose des parures et des emblèmes témoignant de la complexité de la notion de masculinité au sein des sociétés africaines et océaniennes

Le Journal des Arts

Le 5 janvier 2010 - 434 mots

PARIS - Après une exposition axée sur les femmes dans les arts d’Afrique, le Musée Dapper, à Paris, s’attelle à retranscrire la masculinité dans les sociétés africaines et océaniennes. « L’art d’être un homme »…, tout un programme ! Le parcours, riche de plus de cent cinquante pièces, ornements et statues, démontre que la virilité est une notion fine et complexe.

À la puberté, les jeunes garçons prennent leurs distances avec le monde des femmes, qui fut le leur durant toute l’enfance. Commence alors une période d’initiation plus ou moins longue, au cours de laquelle ils subissent des épreuves souvent pénibles, aussi bien physiquement que psychologiquement. Au sortir de ce processus d’acquisition d’une identité, comme le décrit dans le catalogue Christiane Falgayrettes-Leveau, commissaire de l’exposition, les initiés deviennent des hommes et des membres à part entière de leur société. À partir de ce moment-là, les parures et les emblèmes marqueront toutes les étapes de leur vie, symbolisant leurs liens avec l’ensemble de la communauté, les ancêtres et les êtres du monde surnaturel.

Un savant mélange d’être et de paraître
Les objets ont une double utilité : ils donnent une visibilité sociale, affichant le statut de l’homme ainsi que sa fonction – politique ou religieuse –, tout en assurant sa protection, notamment spirituelle. La statuaire ne portraiture pas le vivant, mais se dresse, tel un paratonnerre, contre les forces maléfiques dont l’homme pourrait être victime, à l’image des statues mankishi du peuple Songye (Kasaï oriental, République démocratique du Congo), ou encore de la statuaire Baoulé (Côte d’Ivoire), qui personnifie certains esprits dérangeants. L’omniprésence des ornements figurant sur les statues est mentionnée dans les récits des explorateurs, de James Cook à Louis-Antoine de Bougainville, qui parcoururent les mers du Sud aux XVIIIe et XIXe siècles. La parure, tirant profit de matériaux divers tels que les fibres, les coquillages ou encore les dents d’animaux, met en valeur le corps de l’homme nu. Elle exacerbe sa beauté, ainsi du splendide corset Dinka (Soudan), ou le protége, à l’image de l’impressionnante cape 'ahu 'ula (Polynésie, îles Hawaï).
 
L’exposition ne choisit pas la facilité en s’attaquant aux objets d’ornements et de rituels, difficiles à appréhender hors de leur contexte, d’autant qu’ils proviennent d’une pléthore de peuples aux sociétés plus codifiées les unes que les autres.
 
La manifestation et le riche ouvrage qui l’accompagne délivrent pourtant un propos intelligent : loin de la notion galvaudée de la virilité, être un homme dans les sociétés océaniennes et africaines consiste en un savant mélange d’être et de paraître.

L’ART D’ÊTRE UN HOMME
Commissaires : Christiane Falgayrettes-Leveau, directrice du Musée Dapper ; Anne van Cutsem-Vanderstraete, historienne de l’art

L’ART D’ÊTRE UN HOMME. AFRIQUE, OCÉANIE, jusqu’au 11 juillet 2010, Musée Dapper, 35, rue Paul-Valéry, 75116 Paris, tél. 01 45 00 91 75, www.dapper.com.fr, tlj sauf mardi 11h-19h.
Catalogue, éd. Dapper, 331 p., 32 euros, ISBN 978-2-915258-26-4.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°316 du 8 janvier 2010, avec le titre suivant : Macho macho men

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