L’école de Rouen à la fin du XIXe siècle

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 28 janvier 2011 - 401 mots

« On ignore trop souvent nos écoles de province. Qui connaît l’école de Rouen, actuellement la plus vaillante… ? »

Relevée dans Le Figaro du 22 décembre 1902 sous l’une des plus vives plumes critiques de l’époque, Arsène Alexandre, cette expression peut prêter aujourd’hui à sourire et l’on n’imagine pas un instant pouvoir parler ainsi de la scène artistique contemporaine. Les temps ont changé, ils sont devenus mondialistes et c’est à l’échelle de la planète que l’on jauge, voire juge la situation. À la fin du xixe siècle, il en va d’une tout autre manière et, dans la foulée de l’impressionnisme naissant, on observe que nombre de foyers locaux s’emparent de la nouvelle esthétique.

Que Rouen, capitale de la Haute-Normandie, ville-musée et l’un des plus importants ports fluviaux de l’Hexagone, ait enfanté d’une école picturale conjuguant impressionnisme et postimpressionnisme n’a rien d’étonnant. Non seulement elle bénéficie d’un ancrage au bord de la Seine, qui est par nature consubstantiel à ces deux mouvements, mais elle a été le lieu de séjour et d’inspiration privilégié de quelques-uns des plus grands artistes de ces derniers, comme le festival Normandie impressionniste de l’été 2010 en a rendu magnifiquement compte [lire L’œil n° 626]. C’est dire si Rouen occupa une place de premier choix dans le développement de ce nouveau chapitre de l’histoire de l’art, d’autant qu’il se trouva sur place nombre de figures qui surent en porter haut les couleurs.

L’avant-garde que constituent pour l’époque Charles Frechon, Joseph Delattre, Léon-Jules Lemaître, Albert Lebourg et Charles Angrand contribue à développer un courant pictural spécifique qui décline toute une production de vues de la Seine avec le port et de paysages du Pré-aux-Loups dans un style affirmé qui mêle dans la transparence de l’atmosphère recettes impressionnistes et pointillistes. Comme ils partagent leur temps entre Rouen et la capitale, les artistes de cette première génération usent avec intelligence de leur connaissance des investigations de la modernité. Ceux qui les suivent comme Robert-Antoine Pinchon, Pierre Dumont, Marcel Couchaux, Pierre Hodé ou Maurice Louvrier, parmi d’autres, sauront pour leur part quérir encore plus avant du côté d’une recherche davantage fondée sur la couleur, préfigurant parfois même le fauvisme. Somme toute, bien plus qu’une ville pour l’impressionnisme, Rouen a été une ville pour la peinture.

Voir

« Les peintres impressionnistes et postimpressionnistes de l’école de Rouen », atelier Grognard, 6, avenue du Château de Malmaison, Rueil-Malmaison (92), www.mairie-rueilmalmaison.fr, jusqu’au 18 avril 2011.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°632 du 1 février 2011, avec le titre suivant : L’école de Rouen à la fin du XIXe siècle

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