Musée d'Orsay, Paris 7e

Le « beau » envahisseur

Jusqu'au 15 janvier 2012

Par Isabelle Manca · L'ŒIL

Le 17 novembre 2011 - 379 mots

Après les préraphaélites, le Musée d’Orsay conclut sa saison anglaise en mettant à l’honneur le Mouvement esthétique. Présentée au printemps à Londres au Victoria and Albert Museum, la version parisienne est davantage axée sur la figure de l’esthète et sur la personnalité d’Oscar Wilde, auteur emblématique du mouvement, dont les aphorismes rythment le parcours.

Exhaustive, cette exposition permet de découvrir un courant jamais présenté dans une telle profusion de ce côté-ci de la Manche. Précurseur de l’Art nouveau, le Mouvement esthétique fédère de 1860 à 1900 des artistes d’horizons divers autour de l’affirmation de « l’art pour l’art », idéal qui réside dans la création de beaux objets, la sensualité des matériaux et le rejet du narratif dans la composition. Le mouvement revendique un nouvel art de vivre, un art total qui tend à intégrer le Beau dans toutes les strates de la vie : les arts plastiques, l’habitat mais également l’habillement, donnant ainsi naissance à la figure du dandy. Plus qu’un mouvement au sens strict, il s’agit du point de convergence des recherches d’artistes, de décorateurs et d’hommes de lettres, autour de la mise en place d’un nouvel idéal de beauté, animée par le rejet du matérialisme né de la révolution industrielle et des valeurs puritaines de la société victorienne.

Cette quête passe par le renouvellement des sources d’inspiration : l’Antiquité décadente, les motifs végétaux de type médiéval, mais également le japonisme, créant une synthèse éclectique qui ne cherche pas à ressusciter le passé, mais qui se veut une force créatrice pour conjuguer l’hédonisme au présent. Ce syncrétisme trouve tout particulièrement son accomplissement dans l’essor des arts décoratifs et dans les nouveaux archétypes féminins à la sensualité exacerbée, à l’instar de la ténébreuse Pavonia de Leighton ou des rousses vénéneuses qui hantent les tableaux de Burne-Jones.

Par la reconstitution d’une demeure de collectionneur, l’exposition illustre la variété et le raffinement des créations du mouvement, dans une ambiance feutrée où domine la sensation de luxe et de volupté. Mais du raffinement extrême à la surcharge décorative, il n’y a qu’un pas, et l’exposition se conclut intelligemment sur la décadence du mouvement et sur les gazettes satiriques qui brocardent ses excès.

Voir « Beauté, morale et volupté dans l’Angleterre d’Oscar Wilde »

Musée d’Orsay, 1, rue de la Légion-d’Honneur, Paris-7e, www.musee-orsay.fr

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°641 du 1 décembre 2011, avec le titre suivant : Le « beau » envahisseur

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