L’animal-totem, meilleur ami de l’Afrique

Par Laure Meyer · L'ŒIL

Le 20 décembre 2007 - 377 mots

En Afrique, les animaux sauvages, souvent très proches des humains au quotidien, tiennent aussi le premier rôle dans les mythes, les proverbes et les contes. Les jeunes, durant l’initiation, acquièrent des codes de conduite puisés dans des traditions orales où les animaux incarnent certaines valeurs. Cette omniprésence apparaît dans l’exposition « Animal », au musée Dapper, à travers cent cinquante œuvres. Leur signification doit toujours se lire au second degré, la sculpture africaine n’est pas réaliste, il faut percer les symboles et les codes.
Ces animaux peuvent apparaître dans des situations très différentes. D’un peuple à l’autre, leur sens varie. Dans certains cas, des femmes frappées de stérilité s’adressent à un devin qui leur conseille de rendre un culte à un animal donné qui sera représenté par une sculpture. Le python, le silure, le crocodile, le varan et le singe sont souvent évoqués dans ce contexte. D’autres bêtes, plus féroces, sont invoqués à propos d’actes morbides, quand les initiés de sociétés secrètes se transforment en justiciers, hommes-léopards, hommes-lions, hommes-crocodiles. Actuellement encore, des équipes sportives tendent à renforcer leur cohésion en s’identifiant à un animal, « Lions indomptables » du Cameroun, « Éléphants » de Côte d’Ivoire, « Aigles » du Mali.
Certains animaux ont souvent un statut très particulier : ils sont l’animal-totem d’un groupe social. Il n’y a là rien de commun avec la notion exposée par Freud dans Totem et tabou en 1913, fondée sur la peur de l’inceste, le complexe d’Œdipe et le meurtre du père. À l’époque, l’ethnologie africaine balbutiait à peine. La « horde primitive » n’a existé que dans l’imagination du psychanalyste. Actuellement, c’est une notion réfutée par la communauté scientifique.
On sait au contraire qu’en Afrique, pour de nombreux peuples, l’animal-totem est celui qui, d’après un mythe, serait venu au secours des hommes confrontés à un terrible danger. Ces derniers, reconnaissants, évitent donc de le tuer ou de consommer sa chair. La frontière homme-animal se trouve alors comme abolie. Finalement, ce totem permet un phénomène d’identification qui unit l’ensemble du groupe par un lien indéfectible. Mais le terme de « totémisme » fait encore l’objet de polémiques parmi les chercheurs.

« Animal », musée Dapper, 35, rue Paul-Valéry, Paris XVIe, tél. 01 45 00 91 75, jusqu’au 30 mars 2008.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°598 du 1 janvier 2008, avec le titre suivant : L’animal-totem, meilleur ami de l’Afrique

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque