Art contemporain

La peinture exigeante de Serge Poliakoff

Par Colin Cyvoct · L'ŒIL

Le 26 février 2010 - 353 mots

L’homme moderne est, on le sait, quotidiennement sollicité par des milliers d’images qui défilent constamment devant ses yeux. La possibilité, ou la légitimité, de poser son regard plus de trois secondes sur un tableau peut donc paraître aujourd’hui incongrue ou de peu d’intérêt.

Aussi l’exposition des peintures de Serge Poliakoff (1900-1969) au musée de Pont-Aven est-elle bienvenue : elle nous invite à penser et à voir autrement, en rupture avec les conditionnements culturels contemporains. S’il est une peinture exigeante, qui doit être regardée de longues minutes pour apparaître autrement que comme une simple juxtaposition de surfaces colorées, c’est bien celle de cet artiste d’origine russe, arrivé en France à l’âge de vingt-quatre ans.
 
La vie du garçonnet, treizième enfant d’une fratrie de quatorze, s’écoule luxueusement entre Moscou, Saint-Pétersbourg et les élevages de chevaux qui font vivre la famille. Ses frères et sœurs l’initient à la littérature et à la musique, de fréquentes déambulations dans les églises et les monastères avec sa mère extrêmement dévote le familiarisent avec la peinture d’icônes.

Mais la révolution bolchevique met brutalement fin à cette existence dorée. Après bien des pérégrinations, le jeune Poliakoff se retrouve à Paris en 1923. Il joue de la guitare la nuit dans les cabarets pour subvenir à ses besoins, décide de devenir peintre en 1929. Jusqu’en 1952, date à laquelle il parvient enfin à vendre régulièrement ses toiles, il partagera son temps entre la musique la nuit, le sommeil la matinée et la peinture l’après-midi. Ses rencontres avec Kandinsky, Freundlich, puis avec Robert et Sonia Delaunay seront déterminantes.

À partir de 1937, Poliakoff fait le choix courageux de l’abstraction, souvent mal perçue à l’époque par la critique et les marchands. Il peindra jusqu’à sa mort des tableaux d’une grande simplicité apparente : des surfaces monochromes irrégulièrement imbriquées, avec une extrême attention toujours renouvelée apportée au choix des teintes et des textures : « Toutes les surfaces planes du tableau, liées intimement, se transmettent leurs forces sans entraves à l’image des cellules d’un organisme vivant. »

Voir

« Serge Poliakoff (1900-1969) », musée des Beaux-Arts, place de l’Hôtel-de-Ville, Pont-Aven (29), www.museepontaven.fr, jusqu’au 30 mai 2010.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°622 du 1 mars 2010, avec le titre suivant : La peinture exigeante de Serge Poliakoff

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