Réouverture - Art contemporain

Rodez (12)

Il était une fois les années 1950

Musée Soulages - Jusqu’au 31 octobre 2020

Par Fabien Simode · L'ŒIL

Le 21 mai 2020 - 389 mots

RODEZ

Les années 1950 ne resteront pas dans l’histoire de l’art comme ce que le XXe siècle a produit de mieux, du moins en France.

Christine Annie Boumeester, Composition, 1958, huile sur toile, Musée d'art moderne de la ville de Paris. © Photo Julien Vidal.
Christine Annie Boumeester, Composition, 1958, huile sur toile, Musée d'art moderne de la ville de Paris.
© Photo Julien Vidal.

Coincées entre les avant-gardes du début du siècle et les ruptures occasionnées par l’art contemporain une décennie plus tard, l’art produit dans cette décennie n’aura pas, dans sa grande majorité, marqué son siècle. Cela explique qu’il soit aujourd’hui boudé par le marché et par les institutions. Faut-il pour autant tout jeter à la poubelle ? Trente et un ans après la grande exposition du Centre Pompidou, le Musée Soulages fait le pari que non. Une exposition ayant été consacrée, à Clermont-Ferrand en 2007, à « L’alternance figurative » (aux misérabilistes Buffet ou Lorjou, aux réalistes parnassiens Bardone, Guiramand, etc.), l’institution ruthénoise a pris le parti, elle, de tirer le « fil de l’abstraction ». À partir d’une toile de Delaunay, choisie pour faire la transition avec l’art abstrait de la première moitié du XXe, l’exposition réunit des ensembles d’œuvres géométriques et d’autres plus ou moins « lyriques ». Le Teck de Pan (1956) est l’une des œuvres puissantes de cette proposition. Sorte de mâchoire articulée en bois, elle a inspiré à Maurice Béjart un ballet mettant en scène un couple, à l’issue duquel la femme se fait littéralement dévorer. Moins agressifs sont les tableaux de Claisse. Ses toiles aux couleurs vives sont des imbrications de formes géométriques inscrites dans la lignée de l’Abstraction-Création. Placée en regard, La Cathédrale de Barcelone de Pagava (1955) semble moins inspirée. On passe donc rapidement devant pour mieux s’attarder sur les gravures au burin de Haas, sur la magnifique feuille de métal sur bois de Bergman (N° 13, 1955, Univers d’or) comme sur les explosions colorées de Jaffe. Mais la surprise, à Rodez, vient de la sculpture : de la force de l’imaginaire de Boisecq, des totems primitifs de Muller et plus encore des entrelacs métalliques de Falkenstein (Sans titre, 1957), trois artistes injustement remisées aux oubliettes de l’histoire. Ah oui, nous allions oublier : ces artistes se prénomment Marta, Geneviève, Véra, Terry, Eva, Shirley, Simone, Juana et Claire. Il ne s’agit que d’artistes femmes. Et c’est assurément, après nous donner à relire les années 1950, l’autre grand mérite du Musée Soulages : nous proposer une exposition centrée sur les œuvres d’artistes femmes au moins aussi intéressantes, et pour certaines aussi puissantes, que celles des hommes.

« Femmes années 1950. Au fil de l’abstraction, peinture et sculpture »,
jardin public Foirail, Rodez (12), musee-soulages-rodez.fr

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°732 du 1 mars 2020, avec le titre suivant : Il était une fois les années 1950

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