Reliques

Hommage à « Monsieur Dalí­ »

Par Francine Guillou · Le Journal des Arts

Le 24 avril 2012 - 474 mots

Enrique Sabater, l’homme de confiance et secrétaire de Dalí­ exhibe les témoignages de sa relation avec l’artiste.

PARIS - Encore aujourd’hui, il ne l’appelle que « Monsieur Dalí ». Enrique Sabater fut le secrétaire du peintre et son homme de confiance pendant plus de douze ans, de 1968 à 1981. Dans l’intimité du peintre, Sabater géra la vie quotidienne et l’agenda du maître, et devint l’ami du couple Dalí-Gala au fil des voyages entre Paris, New York et Port Lligat, la retraite catalane. À l’Espace Dalí, les traces de cette amitié s’exposent, entre objets intimes, photographies et dédicaces.

Sabater raconte sa rencontre avec Salvador Dalí comme un coup de foudre, alors qu’il devait l’interviewer en 1968 pour une agence de presse : « J’ai sonné à la porte de Dalí. Il m’a dit : “oui, bien sûr”, mais que ça allait me coûter 15 000 $. C’était son tarif pour une interview. Je n’avais pas cette somme, mais j’ai commencé à lui parler d’un de mes amis, l’écrivain Josep Pla, qu’il adorait. On a discuté de lui pendant trois heures. À la fin, il m’a dit : “Revenez après-demain”. Je lui ai répondu que je n’aurai pas davantage cet argent. Il a souri : “Ça ne fait rien, venez tous les jours”.» Devenu « l’homme à tout faire » de Dalí, « Sabater va se consacrer entièrement à Dalí et à son univers. Il a connu, plus que n’importe qui, la personnalité de l’artiste dans son intimité, au travail ou au repos », insiste Beniamino Levi, commissaire de l’exposition. Autour de la collection permanente de l’Espace, nombre d’œuvres dédicacées, des pages de livre, des morceaux de papiers, des aquarelles, des lettres dictées à son secrétaire : sur tous, les mêmes mots « A Sabater ». La calligraphie elle-même devient une sorte de jeu, elle se fait ésotérique, fantaisiste. Ici, un Don Quichotte, là, une silhouette de femme nue… Sur la Bible de Jérusalem qu’il lui offre, Dalí dessine « Saint Narcisse, patron des mouches » : la facétie n’est jamais loin.

En plus de s’occuper de ses affaires courantes et professionnelles, Enrique Sabater photographie Dalí : près de 24 000 clichés, durant les années qu’il passe aux côtés du maître. Fasciné, Sabater mitraille l’intimité de Dalí et de Gala : un cliché montre Dali, assis dans un hall d’hôtel, sa valise attachée à son poignet par un bout de ficelle. L’atelier du peintre, son salon, ses sorties, les photos de Sabater nous donnent à voir le quotidien, somme toute banal, d’un artiste connu pour son excentricité. « Dès qu’il était en présence d’un inconnu, son ton changeait aussitôt. Il se métamorphosait pour interpréter son rôle » explique encore Sabater. À Montmartre, Monsieur Dalí se dévêt de son « costume d’interview ».

SIGNE DALI

Commissariat de l’exposition : Beniamino Levi Nombre d’œuvres : env. 120

Information

SIGNE DALI, LA COLLECTION SABATER, jusqu’au 10 mai, Espace DalÁ­, 11 rue Poulbot, 75018 Paris, tél. 01 42 64 40 10, www.daliparis.com, tlj 10h-18h. Catalogue éd. Espace DalÁ­, 284p. 39,50 €

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°368 du 27 avril 2012, avec le titre suivant : Hommage à « Monsieur DalÁ­ »

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