musée

Gravelines, urbi et tempori

L'ŒIL

Le 1 décembre 1999 - 371 mots

Dans un rapport resté célèbre, Max Querrien déplorait, au début des années 80, l’appropriation frileuse du patrimoine par les citoyens. « On frôle les cathédrales, on stationne avec embarras et révérence devant les prestigieuses collections des musées (...) tout cela dans sa propre ville et pourtant à des années lumières du quotidien, sans reconnaître au passage le poids d’histoire sociale dont ces témoins sont chargés ». Le rapporteur réclamait l’élaboration de projets culturels d’un genre nouveau, qui rendent les monuments intelligibles et familiers à la population toute entière, lui restituant par là une part de son identité. La politique culturelle menée par le Musée de Gravelines depuis deux ans relève à bien des égards de cette « nouvelle politique du patrimoine ». La pierre angulaire de son programme d’exposition est une maquette, acquise en 1998, copie exacte du plan-relief de la ville réalisé en 1755. Ce dernier, classé Monument historique et actuellement conservé au Musée des Beaux-Arts de Lille, était autrefois présenté dans la Grande Galerie du Louvre et servait de support aux discours des souverains sur l’art de la guerre. Ce fac-similé est accompagné d’un son et lumière mettant en scène deux militaires sous les ordres de Vauban ; l’on y suit les soldats Picard et Poitevin à travers leurs pérégrinations citadines, commentant ici la reconstruction des remparts, là le château datant du règne de Charles Quint. Parallèlement, un film en images de synthèse permet une véritable immersion dans le plan-relief et une promenade virtuelle dans la Gravelines de 1750. En contrepoint, figurent des vues actuelles de la ville, réalisées par le photographe allemand Florian Kleinefenn. Des images qui déroutent même les autochtones par leur angle (360°) et leur format inédit (50 x 150 cm). Gravelines historique, Gravelines contemporaine. De cette confrontation, on déduit qu’à l’aube du IIIe millénaire, les soldats Poitevin et Picard se repéreraient aisément dans la ville actuelle, preuve que celle-ci a su gérer son développement dans le respect des legs du passé. Quant aux Gravelinois, ils sont sans doute un peu plus, au terme de la visite, ces « acteurs motivés et exigeants » que réclamait Max Querrien, animés d’un regard neuf sur leur patrimoine quotidien.

GRAVELINES, Musée du Dessin et de l’Estampe, jusqu’au 15 mai.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°512 du 1 décembre 1999, avec le titre suivant : Gravelines, urbi et tempori

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