FRAC sous pression

Bruno Rousseaud met le turbo à Angoulême

Par Anaïd Demir · Le Journal des Arts

Le 12 septembre 2003 - 426 mots

Pas de doute, Bruno Rousseaud est de type sanguin. Son exposition personnelle à Angoulême, dans le cadre des “20 ans du FRAC”?, naturellement baptisée “O Rhésus ”?, le démontre amplement. Elle a en effet débuté sur les chapeaux de roue avec une performance.

 ANGOULÊME - Le 22 mai, Bruno Rousseaud a fait trembler les murs de l’hôtel Renaissance qui abrite le FRAC Poitou-Charentes. Dans la cour, l’artiste en tenue de pilotage s’est affairé autour d’une Citroën customisée. S’en est suivie une éloquente démonstration de tuning. Cette pratique consiste à transformer, selon une réglementation et un design précis, un véhicule de base en bolide de course. L’œuvre s’offre alors à une compétition entre initiés. Moteur coupé, Bruno Rousseaud a poussé son autoradio à fond ; le son de crissements de pneus et de vrombissements de moteur assourdissants s’enchaînent alors. À la fin de la session, le pilote victorieux va religieusement déposer son casque au centre d’une couronne de lauriers quasi mortuaire.
Dans les salles du FRAC, ce sont les lumières crues des phares de voitures de rallye qui nous aveuglent. Encastrés dans le mur et présentés comme des joyaux, ces éléments vintage sont d’autres symboles de puissance pour mâles en manque de virilité. Bruno Rousseaud s’est d’ailleurs fait remarqué à travers sa série de “Prototypes” : des Porsche, des Alfa Romeo, des Ferrari... bref, de belles voitures, surmontées de tourelles de chars. Si l’artiste a un penchant avéré pour les grosses cylindrées et l’huile de moteur, il cherche surtout à révéler ici les étranges comportements que la mécanique et le désir de pouvoir génèrent chez l’homme. En théâtralisant ces rites, il les vide de leur substance et les dédramatise. Et si le pilote mentionne si souvent son groupe sanguin, l’inscrivant sur son casque, sa combinaison et la carrosserie de son automobile, c’est parce que cette information est vitale sur les circuits. En cas d’accident dans un virage, la perfusion devient alors immédiatement possible.
L’exposition présente aussi un jeu de société très particulier. Proche des échecs, il constitue une allusion aux attentats de 1995 dans le RER à Paris. Ses pions ? Des Cocotte-Minute sous pression, comme il se doit. Une façon de nous montrer que l’amour de la mécanique et la soif de pouvoir peuvent mener jusqu’au bricolage de bombes dans sa cuisine. Effusion de sang ou réelle esthétique, tout cela n’est finalement qu’une question de conduite.

BRUNO ROUSSEAUD, O RHÉSUS

Jusqu’au 11 octobre, FRAC Poitou-Charentes, hôtel Saint-Simon, 15 rue de la Cloche-Verte, 16000 Angoulême, tél. 05 45 92 87 01, tlj sauf dimanche et lundi 10h30-12h, 14h-19h.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°176 du 12 septembre 2003, avec le titre suivant : FRAC sous pression

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