Louvre

Fra Bartolommeo et son atelier

Redécouverte d’un artiste majeur et délaissé

Le Journal des Arts

Le 1 décembre 1994 - 558 mots

Une centaine de dessins – dont certains inédits –, provenant du cabinet des Arts graphiques du Louvre pour le plus grand nombre, de musées de province et de Paris, et de quelques collections particulières françaises, assortis d’un échantillon de peintures, ont été réunis par le spécialiste de ce maître florentin, injustement boudé par les historiens d’art.

PARIS - Conservateur en chef du département des Imprimés et des dessins du Musée royal des beaux-arts de Copenhague, et commissaire de l’exposition, Chris Fisher est le premier à avoir entrepris une étude systématique, à l’échelle internationale, de l’œuvre de Baccio della Porta (1472-1517), mieux connu sous son nom monastique de Fra Bartolommeo, qui jusque-là n’avait pas attiré l’attention des chercheurs.

Outre ses très nombreuses peintures religieuses, mille deux cents dessins (dont plus de mille conservés) ont pourtant été répertoriés à ce jour. Aucun artiste de la Renaissance n’a laissé autant de dessins. Minutieux et travaillant de manière rigoureuse, Fra Bartolommeo réalisait en effet, pour chacune de ses peintures, un très grand nombre d’esquisses et de dessins préparatoires.

Cette exposition succède à deux importantes manifestations organisées par Chris Fisher et consacrées au même artiste : la première, en 1986, aux Offices de Florence, la seconde, en 1990, au Museum Boymans-van-Beuningen de Rotterdam, où sont conservés les deux plus importants fonds de dessins de Fra Bartolommeo. Cette fois-ci exclusivement composée d’œuvres issues de collections françaises, l’exposition du Louvre vient ainsi boucler la boucle. À moins qu’une présentation simultanée des trois ensembles soit envisagée, ce qu’il faut espérer...

Comprenant soixante-dix feuillets (tous exposés), le fonds du Louvre représente la plus riche collection française de dessins de l’artiste, et de ses associés et suiveurs : Albertinelli, Fra Paolino, Bugiardini, Sogliani.

L’album Bonnat
Une partie du travail de Chris Fisher et de Lizzie Boubli, conservateur au département des Arts graphiques du Louvre, a été la mise sur feuillets séparés de l’album Bonnat, offert au Louvre en 1922, qui comprend vingt-trois dessins datant de la jeunesse du peintre (dont une douzaine comportant des études au recto et au verso). Ceux-ci seront donc présentés pour la première fois un à un.

De l’esquisse à la plume (premières feuilles pour Le Jugement dernier de San Marco) au dessin achevé (études à la pierre noire, très finies, du musée de Lille pour le grand tableau du Louvre présenté à l’exposition, La Conversation sacrée), chaque étape du travail de Fra Bartolommeo est ici retracée. Ce peintre, né la même année que Michel-Ange, contemporain de Raphaël qu’il admirait et dont il a été ami, et de Léonard de Vinci..., résume à lui seul toute la Renaissance. Ses dessins peuvent tantôt évoquer, par la linéaire pureté des contours, les grands maîtres florentins du quattrocento, les Ghirlandaio, les Botticelli, les Piero di Cosimo.

Parfois aussi, par de délicates nuances d’ombre et de lumière (croquis à la pierre noire et sanguine des dernières années), ils font écho au précieux colorito des Vénitiens. Là, une esquisse rappelant le lyrisme délicat du Pérugin ou empreinte de la grâce paisible de Raphaël ; ici, d’impétueuses figures d’une Crucifixion toute michelangélesque... Nourri de toutes les influences des grands maîtres italiens, Fra Bartolommeo a fait la synthèse des arts de son temps et doit, à ce titre, être compté au rang des fondateurs de la haute Renaissance.

"Fra Bartolommeo et son entourage", Musée du Louvre, pavillon de Flore, jusqu’au 13 février.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°9 du 1 décembre 1994, avec le titre suivant : Fra Bartolommeo et son atelier

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