Femmes algériennes à l'ouvrage

Par Laure Meyer · L'ŒIL

Le 1 décembre 2003 - 352 mots

Malgré le peu de liberté dont elles disposaient, les femmes algériennes ont su créer de beaux objets avec des matières très simples. Pour tirer de l’oubli ces artisanes inconnues, vivant entre le XVIIIe siècle et le début du XXe siècle, le pavillon des Arts de Paris et le musée des Arts et Traditions populaires d’Alger exposent deux cents de leurs œuvres. Dans le monde rural où le nomadisme existait parfois encore, avec un outillage très rudimentaire, des doigts experts fabriquaient les objets nécessaires à la vie quotidienne. Poteries, vanneries, tissages provenaient essentiellement de Kabylie, des Aurès ou de l’Ouarsenis. Les tapis étaient originaires des Aurès, du djebel Amour et du Guergour, les objets de cuir étaient la spécialité des femmes touaregs. Chaque étape du travail de création donnait lieu à un rituel spécial. Dans cette vie rurale souvent très précaire, il n’était pas question de luxe mais la recherche esthétique apparaît dans la fraîcheur de ces objets où des formes élémentaires recèlent un symbolisme ancestral transmis de génération en génération, enraciné dans la mémoire collective et devenu parfois inconscient. Chaque couleur a un sens, les motifs prophylactiques (main, étoile à huit branches) sont partout répandus et protègent du mauvais œil pour favoriser la fécondité de la femme et la fertilité de la terre. Ils prolifèrent dans les trousseaux de mariées. Dans le monde citadin, celui qu’a peint Delacroix, on était plus sophistiqué, les femmes s’adonnaient surtout à des travaux de broderie. Les tissus pouvaient être luxueux, parfois rehaussés de fils de soie, de métal ou de paillettes. Les objets créés étaient des tentures et coussins pour embellir la demeure familiale ou des vêtements répondant au désir de paraître. L’influence d’artisans andalous originaires de Grenade ou de juifs de Livourne est sensible dans certains décors inspirés des textiles turcs, syriens, persans ou italiens. De nos jours, les brodeuses utilisent aussi de nouveaux motifs floraux et végétaux, en particulier à Annaba, Alger ou Cherchell.

« Algérie, mémoire de femmes, au fil des doigts », PARIS, pavillon des Arts, les Halles, porte Rambuteau, terrasse Lautréamont, Ier, tél. 01 42 33 82 50, 22 octobre-1er février 2004.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°553 du 1 décembre 2003, avec le titre suivant : Femmes algériennes à l'ouvrage

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