Dessins de Schlichter

L'ŒIL

Le 1 décembre 2004 - 348 mots

Il y a presque deux ans, une superbe exposition du musée de Grenoble (« Allemagne années 20 ») nous faisait voir à quel point l’esthétique des artistes de la Nouvelle Objectivité repose sur la puissance du trait, et comment leurs dessins concentrent  l’essence même de leur art. Mieux : ils en constituent l’extrême pointe. Davantage que la couleur, liée à la lumière et à une perception sensitive et affective du monde, la ligne est en effet à même d’objectiver les choses, en les isolant dans un jour abstrait. Rudolf Schlichter (1890-1955) est un des principaux artistes de ce grand courant. Ce que l’historien d’art Gustav Friedrich Hartlaub désigne en 1923 du terme de Nouvelle Objectivité est un regroupement de multiples démarches toutes caractérisées par le recours à une figuration réaliste, froide, souvent grinçante ou caricaturale, qui est une vision implacable de la société allemande de l’entre-deux-guerres.  Schlichter est à Berlin à partir de 1919, il rencontre George Grosz, devient membre du Novembergruppe , et rallie le mouvement Dada de Berlin. Il appartient à « l’aile gauche », la plus virulente, la plus contestataire, de ce grand courant. Les artistes qui la composent (George Grosz, Otto Dix, Karl Hubbuch…) sont fascinés par la vie urbaine, où l’homme moderne est défini par son travail et son milieu, où se révèle de la façon la plus crue l’état de la société, décomposition des valeurs, cruauté de la vie quotidienne. Par la suite, Schlichter s’éloignera de ces préoccupations. En 1932 il revient dans son Württemberg natal et se tourne vers la nature ; ses œuvres manifestent alors un intérêt certain pour le surréalisme.
La trentaine de dessins présentés ici sont bien représentatifs de la période berlinoise de Schlichter. À la fois de son style, vériste sans exagération caricaturale, et de ses grands thèmes : scènes de rue ou de café, crimes sexuels, portraits de sa femme Speedy, prostituées, amies communistes, artistes… Et portraits d’hommes, ouvriers, chômeurs, mutilés de la Première Guerre...

« Rudolf Schlichter, dessins 1919-1929 », PARIS, galerie Tendances, 103 rue Quincampoix, IIIe, tél. 01 42 78 61 79, 6 novembre-24 décembre.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°564 du 1 décembre 2004, avec le titre suivant : Dessins de Schlichter

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