Cristiano Morandini, son Grand Tour

L'ŒIL

Le 1 juin 2003 - 457 mots

À la galerie Lestranger est présentée, dans le cadre du « Carré Rive Gauche », une exposition consacrée à la confrontation d’un artiste contemporain avec des lieux précis du Grand Tour des environs de Rome qui ont attiré des générations d’artistes.
Comment trouver sa voie en mettant ses pas dans les pas des plus grands peintres ? C’est le pari audacieux de Cristiano Morandini. Travaillant dans la province de Rome, il a arpenté les antiques territoires qui ont fasciné des siècles durant les artistes venus de toute l’Europe pour accomplir le Grand Tour. Il sait apprécier les moindres variations climatiques, géographiques, urbaines et humaines de ces lieux qu’il semble connaître de toute éternité, et livre à présent paysages et fragments de sculptures. C’est avec cette terre et ce ciel qu’il a entrepris une lutte créatrice, non pas avec les témoignages laissés par les grands « ancêtres », de Poussin à Corot.
En portant une attention toute particulière à l’atmosphère jadis limpide, et désormais polluée, il a su conquérir une précieuse liberté.
Les aquarelles de Cristiano Morandini tiennent compte jusque dans leur matérialité de l’air de ces lieux qui ont contribué à la naissance de la peinture de plein air, aujourd’hui mêlés de soufre, de plomb et de chrome. Tout en nous proposant un regard poétique et profond, le choix de l’eau permet
la plus intime complicité et perméabilité avec le paysage chimique des collines romaines. Comme c’est souvent le cas dans l’histoire de l’art, la capacité de l’artiste à analyser scientifiquement le monde le conduit à porter un regard renouvelé sur ce dernier et à composer des œuvres qui engendrent à leur tour une vision originale de la nature. Le lac de Vico est vu dans une lumière opalescente d’hiver. Le littoral, de loin, apparaît dans la densité de l’air du soir alors que le bleu d’autres ciels est d’une luminescence chaude due au résultat atmosphérique de sa rencontre avec la terre volcanique. Ici, l’artiste joue sur la fusion, là, sur la densité, ailleurs, sur la vitesse ou sur la dispersion, pour rendre à leur vérité originelle des lieux dont la présence est, en même temps, de
la plus grande actualité.
À la fois profondément ancrée dans la tradition sensible de ces territoires si longtemps et amoureusement fréquentés par de très nombreux artistes européens, et très personnelle, cette œuvre, présentée pour la première fois en France, devrait rencontrer dans un fécond dialogue – qui aura sans doute lieu dans l’esprit de tout amateur d’art – des œuvres plus anciennes, comme les ciels de Pierre-Henri de Valenciennes exposés au Louvre.

« Le Miroir de Diane : œuvres romaines de Cristiano Morandini », PARIS, galerie Lestranger, 38 rue de l’Université, VIIe, tél. 01 42 61 41 68, 10-28 juin.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°548 du 1 juin 2003, avec le titre suivant : Cristiano Morandini, son Grand Tour

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