Chants d’amour et de désirs

Commissaire de l’exposition « Quel Amour ! ? », Éric Corne la relève dans une série de raccords sensibles. Le point d’interrogation qui suit l’exclamation et les deux entrées possibles du parcours inscrivent des tonalités et des visions toutes suggestives mais puissamment évocatrices, à l’image de The Welcome Hands (Les mains de bienvenue) de Louise Bourgeois. Disposés sur cinq blocs de granit, bras et mains en bronze se tendent, se rejoignent, s’entrelacent ou se retiennent. Des périodes de vie, de l’enfance à la mort, s’expriment, et l’amour s’esquisse dans des temporalités et registres différents. Visionner dans son intégralité Les Invisibles de Sébastien Lifshitz, documentaire sur des hommes et des femmes nés dans l’entre-deux-guerres qui n’ont pas eu peur d’assumer leur homosexualité, fait entendre d’autres voix. Excepté quelques associations trop attendues – Nan Goldin et Antoine d’Agata, notamment –, les interactions imaginées par Éric Corne jouent autant sur le registre de l’alchimie que du frottement ou de l’écart. Les chimères d’Élisabeth Garouste face aux corps enchevêtrés du Rouge, nus de Gérard Fromanger, ou la dernière métaphore intergénérationnelle d’Omar Ba face aux silhouettes nues errantes et floues de Miriam Cahn convoquent des états aux antipodes. Les violences contenues dans les toiles de Paula Rego, les évocations autobiographiques de Michèle Sylvander ou le souffle de plus en plus court du baiser de Marina Abramović et d’Ulay entraînent sur d’autres cheminements où la complaisance n’est pas de mise.