Barcelone en 1900 : la rose et le feu

Par Emilie Oursel · L'ŒIL

Le 2 novembre 2007 - 338 mots

Si Barcelone est bien connue pour être une ville bouillonnante, elle l’est moins pour son côté lunatique, même bicéphale, pour ne pas dire schizophrénique. L’exposition « Barcelone 1900 » au Van Gogh Museum, à Amsterdam, retourne aux sources de l’histoire moderne de la capitale de la Catalogne pour en dévoiler les facettes s’y confrontant.
Toutes les fantaisies sont permises en ce début de siècle. Éprises d’Art nouveau, les riches familles érigent des demeures signées Antoni Gaudí, tandis que l’urbaniste Ildefons Cerdà, le Haussmann espagnol, élève des boulevards flambant neuf. Les belles paradent à l’opéra appelé « l’océan de bijoux » et s’arrachent les créations des orfèvres Masriera. C’est avec un cynisme frivole que l’artiste Ramon Casas dépeint en 1898 cette nouvelle Barcelone sous les traits de la chula, cette jeune femme des classes populaires à la toilette et au geste affectés. La ville reste en effet le bastion des masses laborieuses issues de la révolution industrielle.
Les artistes dissidents trouvent refuge dans les publications anarchistes, comme L’Avenç (L’Avance) ou les cabarets. La taverne Les Quatre Chats, tenue par Ramon Casas, révèle ainsi de jeunes créateurs, dont un certain Pablo Picasso, avant que celui-ci ne s’envole pour la vie de bohème parisienne. Ceux engagés sur le front barcelonais dépeignent la réalité la plus brutale avec une touche naturaliste. Un emblème de cet envers du décor est le tableau de Ramon Casas La Charge (1899). Un gardien de l’ordre y balaie la foule sur un fond de crépuscule sanguinolent. Renommé Barcelona 1902 après une émeute de la même année, ce tableau anticipe la confrontation de 1909, lorsque le peuple s’oppose à la guerre du Maroc, faisant plus de deux cents morts. La ville est appelée « la Rose de feu » suite à cet événement.
Passant du culte de l’art et de la beauté à la passion et la rébellion, l’exposition décape l’image délicate de Barcelone, dont elle dévoile le feu et le piquant.

« Barcelona 1900 », Van Gogh Museum, Paulus Potterstraat 7, Amsterdam (Pays Bas), tél. 00 31 20 570 52 52, www.vangoghmuseum-ku.nl, jusqu’au 20 janvier 2008.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°596 du 1 novembre 2007, avec le titre suivant : Barcelone en 1900 : la rose et le feu

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