Architecture

La transparence de la justice

Par Christian Simenc · L'ŒIL

Le 26 mars 2018 - 535 mots

PARIS

Paris -  Dans une ville où les tours ont longtemps été honnies, le nouveau tribunal de grande instance de Paris est un monumental pied de nez, signé par l’Italien Renzo Piano, 80 ans tout ronds et Pritzker Prize il y a deux décennies pile.

Après avoir défrayé la chronique en plantant la « raffinerie » (dixit ses détracteurs) du Centre Pompidou en plein cœur historique de la capitale – lequel vient de fêter ses 40 ans et est, entre-temps, devenu l’un des musées les plus visités au monde –, il élève, cette fois, un immeuble de grande hauteur (IGH) à l’extrême limite de la ville, au bord du boulevard périphérique. « Avec Beaubourg, il était alors important de sauvegarder et de féconder le centre historique, explique Renzo Piano. Aujourd’hui, il faut arrêter de construire de nouvelles périphéries et compléter celles existantes en les irriguant de bâtiments publics. Avec ce nouveau palais de justice, l’objectif est d’y amener la vie civique. » Et celle-ci se veut XXL : 38 étages, 160 m de hauteur (antennes comprises), une surface totale de 104 000 m2, le tout pour accueillir de 8 000 à 9 000 personnes par jour. Bref, une petite ville logée dans un édifice élancé et élégant, superposition de quatre parallélépipèdes aux volumes décroissants, tout habillés de verre et jouant avec la luminosité et les transparences. Les deux façades principales, orientées est-ouest, « prennent » ainsi la lumière du lever au coucher du soleil et la majorité des bureaux sont éclairés naturellement. « Quelque chose d’atmosphérique se joue entre la surface en verre du bâtiment et les nuages qui passent, dit Piano. L’édifice se mesure au ciel de Paris. »Le fractionnement des volumes, qui obéit, en outre, à la logique fonctionnelle de séparation des trois parcours – celui des juges, celui des justiciables et celui du public –, a permis de déployer quelque 10 000 m2 de terrasses plantées de vrais arbres. « Un brin de poésie dans la rationalité, sourit l’architecte. Maintenant, il faut attendre que ça pousse. Dans cinq ou six ans, ce sera un parc qui flottera sur Paris. » L’intérieur itou est, de fait, très lumineux, aussi bien dans les espaces communs, telle l’immense salle des pas perdus, que dans les salles d’audience (90 au total). Idem avec les matériaux, dont quantité de clairs, en particulier les revêtements et parquets en hêtre blond. Pour Piano, la justice s’avère un formidable thème de réflexion : « Ces dernières décennies, estime-t-il, la justice a profondément changé. Elle est devenue plus subtile, notamment sur le plan du respect de la personne. Lorsqu’il y a des changements dans la société, l’architecture doit leur donner forme. J’ai voulu un lieu qui accueille la lumière. J’espère que cela améliorera la façon de rendre la justice. » La première audience est fixée au 16 avril.
 

À savoir
Le 27 novembre 2017, pour le nouveau tribunal de grande instance de Paris, Renzo Piano a été récompensé par l’Équerre d’argent, 35e du nom, prix décerné par le magazine

Le Moniteur-AMC

et considéré comme le Goncourt de l’architecture. Pour le jury, qui s’est tout simplement dit « bluffé » par ce bâtiment, celui-ci a permis de créer « une composition urbaine puissante ».
À voir
Tribunal de grande instance de Paris, 29-45, avenue de la Porte-de-Clichy, Paris-17e, www.nouveaupalaisdejustice.fr

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°711 du 1 avril 2018, avec le titre suivant : La transparence de la justicE

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