Foire & Salon

Artissima, collectionneurs et institutions au rendez-vous

Par Stéphane Renault · lejournaldesarts.fr

Le 7 novembre 2017 - 838 mots

TURIN / ITALIE

La 24e Foire internationale d’art contemporain de Turin s’est déroulée du 3 au 5 novembre. Avec un nouveau secteur dédié au dessin, la grand-messe automnale de l’art dans le Piémont continue d’attirer commissaires et institutions, renforçant sa dimension curatoriale.

Vue de la foire Artissima
Vue de la foire Artissima
Photo Perottino
Courtesy Artissima

« Cette année marque le 50e anniversaire de la genèse de l’Arte Povera. Artissima a voulu revenir sur certaines des expériences les moins conventionnelles de cette période fondatrice de la réputation de Turin comme capitale italienne de l’art contemporain. » Les propos d’Ilaria Bonacossa, critique d’art et commissaire d’exposition, directrice de la foire pour la première fois, résument l’approche singulière qui donne son identité à la foire turinoise. Un savant mélange d’exercice commercial mais aussi – et surtout – d’accrochages confiés à des commissaires. Avec un souci constant de qualité, de (re)découvertes et de mise en perspective historique. Un gage de succès, construit au fil des ans. 52 000 visiteurs ont fréquenté cette édition 2017, dont plus de 300 commissaires internationaux et directeurs de musées. Neuf conseils de musées ont fait le déplacement, parmi lesquels le Garage Museum of Contemporary Art de Moscou, Le Palais de Tokyo à Paris, MALBA – Museo de Arte Latinoamericano à Buenos Aires, Le Museum of Contemporary Art de Varsovie, les Amis de Zachęta et les organisateurs de Manifesta 2018.

On vient parcourir les allées du bâtiment, situé à proximité du célèbre « Lingotto » de la Fiat, avec la certitude de pouvoir échanger avec les marchands sur la démarche de tel ou tel artiste, au-delà du seul prix des œuvres. On y vient aussi pour le plaisir des yeux, celui de prendre le temps de regarder et comprendre, s’ouvrir à de nouveaux horizons. Pour l’art italien chez lui, largement représenté – 80 enseignes italiennes pour 126 étrangères. Enfin, pour l’ambiance décontractée, cette « sprezzatura » qui fait le charme de la Péninsule, mélange d’allure et de fausse nonchalance, dont Gianni Agnelli, « l’Avvocato », l’un des plus célèbres enfants de l’ancienne capitale italienne, reste la meilleure incarnation.

206 galeries de 32 pays participaient cette année. Outre la nouvelle section Disegni, comme son nom l’indique, consacrée exclusivement au dessin, Artissima était l’occasion de découvrir un projet intitulé « Deposito d’Arte Italiana Presente ». Un ensemble d’œuvres prêtées par plusieurs institutions de la région piémontaise, collectionneurs privés et galeries participantes. Finalité : résumer la vitalité créatrice de ces vingt dernières années en Italie. Au passage, un clin d’œil au format créé par Marcello Levi en 1967-68, qui lança alors, sous ce nom et dans cette même optique, un lieu de création et d’exposition pour les artistes émergents.

Les autres sections de la foire, en tout au nombre de sept, rassemblaient les galeries les plus représentatives sur la scène artistique internationale (Main section), des galeries émergentes (New Entries), des éditions et multiples signés d’artistes contemporains (Art Editions), des confrontations entre deux ou trois artistes (Dialogue). S’y ajoutaient une section vouée aux talents émergents (Present Future), une autre, passionnante, consacrée à la redécouverte d’artistes actifs dans les années 1980 (Back to the Future). La galerie Twelve gates arts de Philadelphie avait vendu plusieurs œuvres de Judy Blum Reddy, présente dans de grandes collections et musées. Née en 1938 à New York, l’artiste a exposé aux côtés de Nancy Spero, Betty Tompkins, Louise Bourgeois... Une grande pièce intitulée « Paris Ville Lumière » (1974) a été acquise par le Musée Carnavalet pour un peu plus de 200 000 euros. La parisienne Anne-Sarah Bénichou et la genevoise Laurence Bernard présentaient quant à elles des pièces historiques de Marion Baruch, à laquelle le musée de Lucerne devrait consacrer une rétrospective en 2020. Le Musée d'art moderne de Paris s’est montré intéressé par l’acquisition de nouvelles œuvres.

Les ventes étaient aussi concluantes dans les autres sections. Jouant à domicile, les enseignes italiennes trouvent là l’occasion de rencontrer de nouveaux collectionneurs. La galerie Tega de Milan avait ainsi cédé plusieurs pièces. Sur son stand : des oeuvres en ciment armé de Giuseppe Uncini, de 45 000 à 280 000 euros pour une pièce historique (1959), rappelant les trois grandes (1961) accrochées dans une salle du GAM (Galleria Civica d’Arte Moderna & Contemporanea) de Turin. Egalement, un bel ensemble de dessins préparatoires de Christo, de 48 000 pour le plus petit à 450 000 euros pour le plus grand, illustration détaillée du projet qui vit l’artiste emballer le Pont Neuf, à Paris, en 1985.

Plusieurs événements étaient organisés à l’occasion de la foire, profitant de la venue du monde de l’art et des collectionneurs. La grande collectionneuse Patrizia Sandretto Re Rebaudengo inaugurait la nouvelle exposition de sa Fondation en présence de nombreux artistes. On pouvait, entre autres, y voir une vidéo d’Hito Steyerl, en tête cette année du classement Power 100 de Art Review ou une installation de Liam Gillick, qui signait également l’étiquette de l’édition spéciale du Barbaresco Rinaldi (2014) servi lors du dîner chez la collectionneuse pour fêter les 25 ans de la collection. Dans le Piémont, terre du Barolo et autre tartufo bianco, l’art est aussi un art de vivre.

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