Une saison très pop

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 15 octobre 2008 - 1155 mots

Warhol est à l’honneur dans les ventes organisées pendant la FIAC par les maisons Artcurial et Cornette de Saint Cyr. Une valeur sûre dans un contexte incertain ?

Dans le sillon de la FIAC, deux maisons de ventes parisiennes organisent, du 25 au 28 octobre, une série de ventes d’art contemporain à l’attention des amateurs. « Notre calendrier coïncide avec celui de la FIAC depuis une dizaine d’années, à une période beaucoup moins chargée qu’en décembre, explique le commissaire-priseur Arnaud Cornette de Saint Cyr. Collectionneurs et marchands sont là pour acheter de l’art contemporain. Nous avons des acheteurs réguliers à qui nous proposons un choix différent de ce qu’offre la FIAC. » Chez Artcurial, la tenue de ventes d’art contemporain au moment de la FIAC est plus récente et tient compte de la proximité géographique entre le Grand Palais et l’hôtel Dassault. Plusieurs œuvres d’Andy Warhol se partagent l’affiche rond-point des Champs-Élysées, à commencer par Flowers, une toile sérigraphiée très colorée de 1964, estimée 350 000 euros. La section warholienne inclut une galerie de trois portraits : celui de l’artiste Joseph Beuys daté de 1983, issu d’une collection particulière belge et estimé 280 000 euros ; le flamboyant Portrait de Debra Arman (1986) de 1 x 1 m, estimé 350 000 euros, et un Portrait de Sandy Brant (vers 1970), provenant de la Tony Shafrazi Gallery (New York) et estimé 220 000 euros. Notons encore un Parrot (1983), estimé 50 000 euros, que le propriétaire a acquis directement auprès de la Factory en 1984. Le chapitre pop promet également un LOVE (1966-2000), sculpture polychrome de 91,5 cm3, signée Robert Indiana et estimée 370 000 euros.

Signé Basquiat-Warhol
Chez Cornette de Saint Cyr, Indiana est aussi à l’honneur avec une grande toile pop, Eine kleine Nachtmusik, Mozart (1967), estimée 450 000 euros, et un PREM (2007), sculpture en aluminium peint en rouge, également appelée « Indian Love », éditée à 8 exemplaires et estimée 50 000 euros. Mais la vedette reste Warhol avec l’iconique Four Marilyn (Reversal) (1979-1986), estimée 1,5 million d’euros. Sur une estimation similaire et provenant de la même collection genevoise, Gem Spa, un autoportrait signé Jean-Michel Basquiat et daté de 1982, est l’autre lot phare de la vente. Il a fait partie de la collection Jean-Charles de Castelbajac à Paris. Il faudra aussi compter avec la très grande toile Ge (1986), fruit d’une collaboration Basquiat-Warhol et cosignée. Estimée 900 000 euros, elle a un pedigree qui l’honore : la collection Gianni Versace à New York.
Toujours chez Cornette de Saint Cyr, la vente de Virgin, Exposed (2005), sculpture de Damien Hirst en résine peinte éditée à 15 exemplaires, constituera un vrai test pour le marché, en pleine période de récession économique et après le succès de la vente Hirst les 15 et 16 septembre à Londres chez Sotheby’s (lire le JdA no 288, 3 octobre 2008, p. 27). Arnaud Cornette de Saint Cyr l’a estimée prudemment 350 000 euros, soit environ la moitié du prix atteint pour une sculpture de la même série à Londres chez Phillips de Pury & Company, le 15 octobre 2007. L’estimation pour Eternal Halo (2003), huile sur toile de 2 x 3 m signée Wang Guangyi, a aussi été revue à la baisse. Le tableau, qui n’avait pas trouvé preneur chez Cornette de Saint Cyr le 31 mars 2007 sur une estimation basse de 300 000 euros, est proposé ici pour 180 000 euros. La célèbre poule en bronze soudé de César, La Rambaud (1987), haute de 95 cm, numérotée 2/8, est présentée à 180 000 euros le 25 octobre. Problème : le surlendemain, Artcurial en disperse un autre exemplaire estimé seulement 80 000 euros ! De même, Enter ! (2004), sculpture de 2,60 m en résine peinte de Wang Du, exécutée à 8 exemplaires, est annoncée à 100 000 euros. Fût-elle celle qui a été exposée au Palais de Tokyo en 2004, l’addition semble un peu lourde par comparaison avec la sculpture du même esprit, Il y a des jambes qui en disent long (1999), pièce unique de l’artiste offerte chez Artcurial pour la même somme.
Pour les amateurs de l’œuvre de Fernando Botero, Cornette de Saint Cyr pense détenir le tableau parfait : Fille au chat (1989), sorte d’Alice au pays des Merveilles gonflée à l’hélium, estimée 750 000 euros. Enfin le bureau de Jean Tinguely, une quasi-sculpture faite d’un assemblage de fonte et de fer soudés, est à saisir pour 100 000 euros. Chez Artcurial, on se félicite d’une peinture sur métal de 1988 signée Robert Rauschenberg, Wrap Up (Galvanic Suite), attendue autour de 200 000 euros. Dans un ensemble d’œuvres plutôt moyennes de la seconde école de Paris (notamment pour Serge Poliakoff et Georges Mathieu), relevons un paysage abstrait très poétique de 1977 par Zao-Wou-ki, 25. 02. 77, estimé 300 000 euros, ainsi qu’un beau tableau de Hans Hartung, T 1963-H40, estimé 150 000 euros. Artcurial parie aussi sur la cote ascendante de Wangechi Mutu avec The Partician new… (2004), une toile estimée 100 000 euros. « Deux peintures de l’artiste de format similaire ont dépassé les 300 000 euros à Londres et à New York au cours des dix derniers mois », indique l’expert Martin Guesnet. Du côté du cutting-edge (art ultra-contemporain) et pour un budget moindre, la maison de ventes propose une sélection intéressante qui comprend un tirage chromogénique de 2003 numéroté 1/5 de Piotr Uklanski, représentant le portrait de Jean-Jacques Aillagon alors ministre de la Culture et de la Communication (est. 35 000 euros) ; Nuit de noces (1997), un néon rose édité à 5 exemplaires d’Adel Abdessemed (est. 18 000 euros), ou encore une Pipe 2, cliché érotique de Wim Delvoye, saisi par une machine à rayons X, numéroté 6/6 (est. 12 000 euros).

Réajustements
À l’heure où le marché de l’art commence à montrer des signes d’inquiétude, le virus acheteur des collectionneurs va sans doute se porter sur des œuvres triées sur le volet, bien datées et raisonnablement estimées. Combien de pièces resteront-elles sur le carreau ? Les ventes d’art asiatique moderne et contemporain ont essuyé les premiers plâtres de la crise, les 4 et 5 octobre à Hongkong chez Sotheby’s, avec 60 % de lots vendus et 42 % en valeur à l’issue de la vente de prestige du soir. Selon les spécialistes de l’auctioneer, « le marché de l’art contemporain chinois a connu une croissance sans précédent [au cours d]es cinq dernières années, passant de 3 millions de dollars [2,4 millions d’euros] d’enchères en 2004 à 194 millions de dollars en 2007. Aussi n’est-il pas surprenant qu’il connaisse certains réajustements, en plus de quelques estimations trop optimistes ». En d’autres termes, la crise est bien là.

CORNETTE DE SAINT CYR
- Expert : Julien Gonzalez-Alonso
- Estimation : 8,5 1,5 millions d’euros
- Nombre de lots : 80 115

ARTCURIAL
- Expert : Martin Guesnet
- Estimation : 7 3 millions d’euros
- Nombre de lots : 107 346

ART CONTEMPORAIN PARTIES I et II, vente les 25 et 26 octobre à Drouot-Montaigne, 15, avenue Montaigne, 75008 Paris, SVV Cornette de Saint Cyr, tél. 01 47 27 11 24 ; expositions publiques : le 22 octobre 14h-20h, les 23 et 24 octobre 11h-20h et le 25 octobre 11h-16h, www.cornette.auction.fr

ART CONTEMPORAIN 1 et 2, vente les 27 et 28 octobre à l’hôtel Dassault, 7 rond-point des Champs-Élysées, 75008 Paris, Artcurial, tél. 01 42 99 20 31 ; expositions publiques : les 25 et 26 octobre 10h-21h, le 27 octobre 10h-15h, www.artcurial.com

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°289 du 17 octobre 2008, avec le titre suivant : Une saison très pop

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