Londres

Un dôme de verre signé Foster pour le British Museum

Norman Foster a remporté la consultation internationale pour rénover le musée

Le Journal des Arts

Le 1 septembre 1994 - 1016 mots

Le Louvre a sa pyramide de verre, le British Museum aura son dôme en verre, signé par l’architecte Norman Foster. Profitant du départ annoncé de la British Library, le plus célèbre musée d’outre-Manche se lance dans de grands travaux à l’horizon 2003, devant mobiliser 100 millions de livres sterling (830 millions de francs).bou

LONDRES - Ce chantier de rénovation sur dix ans, qui doit s’achever pour le 250e anniversaire du British Museum, est le plus ambitieux à ce jour pour un musée en Grande-Bretagne. Le départ de la British Library vers le quartier de Saint Pancras, au nord de Londres, annoncé pour 1996, devrait libérer 40 % de surface supplémentaire pour le musée.

Cet accroissement va être mis à profit pour aménager de nouveaux espaces d’exposition et revoir le parcours à travers les collections d’une institution qui reçoit aujourd’hui plus de six millions de visiteurs par an, contre 62 000 au début du XIXe siècle.

Le conseil d’administration, présidé par Lord Windlesham, a décidé fin juillet de confier à Sir Norman Foster les toutes premières modifications jamais apportées au musée depuis 1914. Adepte de l’architecture "transparente", faite de métal et de verre, Norman Foster est devenu mondialement célèbre après sa réalisation de la "Hong Kong and Shanghai Bank" à Hong Kong, une prouesse high tech. Il a déjà une expérience dans le domaine des musées, puisqu’on lui doit les Galleries Sackler de la Royal Academy ainsi que le Carré d’art, musée d’art contemporain et médiathèque, à Nîmes.

Au cœur du projet figure la Grande Cour, conçue en 1820 par l’architecte du bâtiment néo-classique du British Museum, Robert Smirke. Celle-ci a perdu sa destination première depuis 1857, avec la construction de la célèbre salle de lecture de la British Library ainsi que celle de plusieurs bâtiments. Ces bâtiments perturbent la circulation au sein du musée. Ainsi, la salle de lecture, au centre de la Grande Cour, gêne le passage entre la partie avant et arrière du rez-de-chaussée du musée.

Le projet de Norman Foster prévoit de bâtir, autour de la salle de lecture circulaire, un espace aménagé de forme elliptique, qui fermerait complètement la Grande Cour tandis que des escalators permettraient un accès aux étages. Sir Foster souhaite faire de cette cour intérieure – d’une superficie dépassant une fois et demie un terrain de football –, le cœur du musée. Il prévoit de la recouvrir d’un dôme en verre gigantesque. Selon le directeur du British Museum, Robert Anderson, ce dôme pourrait avoir sur le public et le musée le même impact que la pyramide de Ieoh Ming Peï sur le Louvre.

Le conseil d’administration a décidé de maintenir la fonction de la salle de lecture, alors que certains projets voulaient en faire le centre d’accueil du musée. Cette salle sera restaurée et devrait être dorénavant ouverte à l’ensemble du public avec, en outre, des équipements modernes d’information sur les collections du musée.

Par ailleurs, le projet prévoit le retour des collections du département d’ethnographie, qui avait dû rejoindre il y a vingt-quatre ans le Musée de l’homme à Picadilly, lorsque le British Museum était devenu trop exigu.

Sur vingt-deux projets, émanant d’architectes tels que Richard Rogers, Gregotti Associati, Apicella and Wilmotte et Michael Wilford, le comité de sélection du British Museum – composé de Sir Peter Harpon, Michael Hopkins, Sir Clos Moser, Sir Colin Stanfield-Smith and Sir William Whitfield –, avait retenu trois candidats. Sir Norman Foster l’a emporté sur ses concurrents, Arum Associates et Rica Mater. Les travaux, évalués à 100 millions de livres sterling (830 millions de francs), seront financés par les revenus issus de la nouvelle Loterie Nationale et par des dons privés.

Néanmoins, le Dr Robert Anderson a tenu à souligner à diverses reprises, lors de la conférence de presse annonçant le projet, que celui-ci dépendait avant tout pour ses délais de réalisation du départ de la British Library. Or, la future grande bibliothèque de Saint Pancras est, de plus en plus, la cible de vives critiques, aussi violentes que celles qui avaient émaillé le lancement de la Bibliothèque de France à Paris. Le Comité de consultation pour le Patrimoine national a récemment qualifié le projet de "pagaille sans nom".

Un rapport de la Commission des affaires culturelles de la Chambre des Communes estime que le bâtiment est "l’un des plus laids au monde" et déplore la multiplication par trois du coût des travaux. À ces critiques s’ajoutent celles visant le retard du chantier : la nouvelle bibliothèque, décidée en 1978, aurait dû ouvrir en 1990…

L’annonce de la rénovation du British Museum a succédé à l’ouverture de deux nouvelles galeries, venant compléter les départements de l’Antiquité tardive et du Moyen-âge. Elles présentent des œuvres de la Renaissance italienne jusqu’au XIXe siècle. Le succès remporté par le réaménagement, en 1991, des galeries consacrées à la civilisation romaine, où l’on a associé des sections chronologiques et thématiques, est à l’origine des travaux de réaménagement des nouvelles galeries. Ces salles étaient vouées jusqu’ici aux collections de céramique, désormais transférées au Centre d’études de la céramique de Montagu Street.

Dans ces espaces nouvellement libérés, il a été possible d’exposer des pièces demeurées jusqu’ici en réserve, de montrer des œuvres britanniques parmi les créations européennes, et de présenter des objets américains dans les créations du XIXe siècle. Les monnaies et médailles présentées constituent un ensemble exceptionnel ; on y admire des monnaies et médailles d’artistes comme Pisanello, Le Bernin, David d’Angers ou Alfred Gilbert, particulièrement représentatifs sur une aussi longue période.

La porcelaine des départements orientaux et extrême-orientaux illustre l’histoire des liaisons commerciales entre l’Europe et ces régions depuis 1450, et met en évidence les transferts de technique qui se sont opérés dans les deux sens. La donation Godman de poterie espagnole vernissée, replacée dans un contexte européen et chrétien, met en lumière l’origine islamique des techniques d’enduit à l’oxyde d’étain.

De même, la juxtaposition de l’argenterie, de la verrerie et de la poterie de la Renaissance permet de se rendre compte de l’évolution parallèle de certaines formes et des emprunts. Ainsi, les carreaux de céramique de William De Morgan voisinent avec les superbes faïences ottomanes d’Iznik.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°6 du 1 septembre 1994, avec le titre suivant : Un dôme de verre signé Foster pour le British Museum

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