Urbanisme

Selon la Cour des comptes, « Action Cœur de Ville » peut mieux faire

Par Sindbad Hammache · Le Journal des Arts

Le 12 octobre 2022 - 605 mots

FRANCE

Dans un rapport globalement positif, la Cour des comptes pointe la faiblesse des outils mesurant l’investissement financier et les effets du plan de revitalisation des centres-villes.

Quartier de la Boucherie dans le centre-ville de Limoges (Haute-Vienne). © Matt Brown, 2014, CC BY 2.0
Quartier de la Boucherie dans le centre-ville de Limoges (Haute-Vienne).

France. Transversal ou « protéiforme » pour les rapporteurs de la Cour des comptes, le programme « Action Cœur de Ville » (ACV) œuvre depuis 2018 à la revitalisation des centres-villes dans les communes de taille moyenne (entre 20 000 et 100 000 habitants). Qualifié de « déclencheur » ou de « catalyseur » par les élus des 222 villes sélectionnées par l’Agence Nationale de la cohésion territoriale (ANCT), il leur permet d’agir dans cinq domaines : le logement, le patrimoine, les commerces, la mobilité et les services. « Action Cœur de Ville » fait l’objet d’une évaluation bienveillante de la Cour des comptes, qui indique toutefois des limites, comme les difficultés rencontrées pour en évaluer les effets.

Pour les magistrats de la rue Cambon, l’engagement financier annoncé en 2018 (5 milliards d’euros, dont 600 millions de l’État) est loin d’être tenu. Par exemple, la Banque des territoires-Caisse des dépôts – l’un des trois partenaires associés à l’État pour financer le programme – n’a engagé que 60 % du 1,7 milliard d’euros envisagés. Et si les prêts aux communes ont dépassé les objectifs fixés (106 %), les crédits d’ingénierie (66 %) et les crédits d’investissements (27 %) ne seront pas consommés avant fin 2022. La prolongation jusqu’en 2026 est donc appréciée, alors que le programme a eu quelques difficultés à passer en phase opérationnelle.

Par ailleurs, si l’ANCT avance le chiffre de 77,2 % de la somme totale engagée, le rapport note que ce résultat « prend en compte des dépenses ou actions qui prolongent ou complètent le programme ACV, mais ne s’inscrivent pas dans le cœur du dispositif ». Tout en se félicitant de l’effet d’entraînement du programme, la Cour des comptes recommande donc de mettre en place un suivi plus précis des financements, afin que les objectifs ne se trouvent pas dissous parmi les dizaines d’initiatives conduites autour des enjeux territoriaux.

De la même manière, les magistrats remettent en cause les outils mis en place pour mesurer l’impact des actions engagées par le programme. Ces derniers distinguent mal les effets de cette politique ciblée et ceux de mouvements plus larges, comme l’exode métropolitain constaté au sortir de la crise du Covid-19. Certains des indicateurs retenus par l’ANCT se montrent même inadaptés comme, par exemple, le volume du marché immobilier, qui est souvent dopé dans les villes de taille moyenne par les maisons individuelles en périphérie des villes. Or le modèle pavillonnaire périurbain va à l’encontre des objectifs de revitalisation des centres-villes, « Action Cœur de Ville » promouvant une réhabilitation des logements dans les centres anciens.

Faciliter les mises en chantier complexes

Concernant l’évaluation réalisée par l’association Sites et Cités, le rapport de la Cour des comptes observe l’indispensable assistance à ingénierie qu’apporte le programme pour les lourds projets de réhabilitation du centre-ville. La loi 3Ds pérennise cet outil – qui permet aux communes modestes de monter des chantiers complexes – à travers le Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement), qui proposera des prestations d’assistance à ingénierie accessibles en quasi-régie, sans passer par un appel d’offres.

Les magistrats aimeraient voir davantage d’exemples de ce type, où les objectifs locaux du programme s’articulent avec une politique nationale concertée de manière interministérielle. Le rapport note ainsi la faiblesse des politiques sur la revitalisation du rail, ou la régulation du commerce en ligne, des leviers pourtant importants pour concentrer la vie et les activités au cœur des villes. Le ministère de la Culture est présent dans ce programme par l’implantation des « Micro-Folies » et l’expertise de la Cité de l’architecture et du patrimoine.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°596 du 7 octobre 2022, avec le titre suivant : Selon la Cour des comptes, « Action Cœur de Ville » peut mieux faire

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