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Querelles au Plateau

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 2 juillet 2008 - 711 mots

Le Plateau-FRAC Île-de-France fonctionnera désormais avec une direction unique. Un choix qui inquiète les anciens directeurs artistiques du lieu.

PARIS - Le Plateau se meurt, le Plateau est mort. Voilà ce que martèle depuis plusieurs semaines l’artiste Éric Corne. D’après lui, le choix ratifié le 29 mai par le conseil d’administration d’une direction unique du Plateau-FRAC Île-de-France signe la disparition programmée de l’activité de centre d’art du site. Créé à l’arraché en 2002 grâce au volontarisme d’une association de quartier menée par Éric Corne, le Plateau fonctionne comme un centre d’art sans bénéficier pour autant d’un statut juridique. L’espace d’exposition, d’une surface de 520 m2, est ainsi pris sous l’ombrelle du Fonds régional d’art contemporain (FRAC) Île-de-France qui dispose du bail et gère le budget, l’équipe et la communication. Jusqu’à présent, ce lieu hybride fonctionnait sous le régime d’une codirection, la dernière en date ayant été assurée par Caroline Bourgeois, directrice artistique du Plateau, et Xavier Franceschi, directeur du FRAC. Le départ de Caroline Bourgeois, devenue conseillère de François Pinault, a conduit Xavier Franceschi à prendre l’entière responsabilité de l’espace. « Depuis le début, tout le monde s’accorde à dire que la codirection n’est pas la formule idéale, qu’elle ne pouvait marcher que si deux personnes faisaient un projet ensemble, indique ce dernier. Or il y a eu une succession de personnes mises côte à côte. À chaque fois que quelqu’un du FRAC ou du Plateau partait, personne ne s’accordait sur le fait que celui qui resterait prendrait l’ensemble de la direction. » Ce choix d’une tutelle unique fait bondir Éric Corne. « S’il y a un problème dans l’association FRAC-centre d’art-Le Plateau, il vient du FRAC, écrit-il le 26 mars à Germaine de Liencourt, présidente du FRAC. La réussite du Plateau, j’en suis convaincu, et tous les acteurs d’art contemporain en conviendront, vient de son centre d’art. Le FRAC, quant à lui, peine toujours à trouver la vraie cohérence artistique avec un projet. Le texte de son directeur en est encore une fois la démonstration. Il semblerait aberrant qu’on supprime la partie active, le centre d’art, au profit de celle qui n’a pas réussi encore à convaincre et prouver son originalité, sa pertinence. »

Commissaire invité
Y a-t-il vraiment péril en la demeure ? Non, assure Xavier Franceschi en affirmant vouloir préserver l’intégrité du Plateau. « Évidemment, le Plateau va subsister, voire se renforcer en gardant le fonctionnement “centre d’art”, déclare-t-il. Je me suis occupé pendant onze ans du centre d’art de Brétigny-sur-Orge et je trouve inadmissible qu’on me soupçonne de vouloir en finir avec le Plateau. C’est un procès d’intention ! On continuera à faire une programmation d’expositions tournées sur la création contemporaine avec de la production. La direction unique permettra de donner une cohérence à l’ensemble. » D’ici à l’automne 2009, Franceschi a dans les tuyaux des expositions d’Ulla von Brandenburg et de Richard Fauguet, tous deux représentés par la galerie parisienne Art : Concept. Pour la suite, il entend convier un commissaire extérieur, chargé de la programmation pour une durée d’un an renouvelable une fois. La première carte blanche a été donnée au curateur et critique d’art Guillaume Désanges, dont on devrait voir la griffe à partir de septembre 2009. Celui-ci admet ne pas avoir été choisi sur la base d’un projet, ni selon un appel d’offres. « J’ai fait un projet général sur ma conception du commissariat, sur l’idée d’équilibre et de déséquilibre. C’est trop tôt pour un projet spécifique », confie-t-il en précisant qu’il devrait a priori réaliser deux expositions au Plateau et une hors les murs. Caroline Bourgeois avait déjà suggéré le recours à un commissaire extérieur dans une note adressée en avril au conseil d’administration. À ceci près qu’elle avait précisé que le choix de cet invité français ou étranger devait s’effectuer sur la base d’un projet singulier. « Il faudra réfléchir à la programmation par rapport à l’identité du lieu, son inscription dans le 19e arrondissement, insiste-t-elle. C’est un lieu difficile, qui peut très vite perdre sa spécificité et ses visiteurs. » Ce d’autant plus que la Ville de Paris, soutien du Plateau pour l’activité centre d’art, semble moins préoccupée par la consolidation de l’existant que par la création de nouvelles entités, comme la Maison des métallos ou le « 104 ».

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°285 du 4 juillet 2008, avec le titre suivant : Querelles au Plateau

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