Nominations

Nouvelles têtes à Beaubourg et à la BNF

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 2 août 2007 - 818 mots

Le départ de Bruno Racine pour la Bibliothèque nationale de France et l’arrivée d’Alain Seban au Centre Pompidou suscitent les controverses.

PARIS - À l’approche de l’élection présidentielle, une valse de nominations vient d’avoir lieu à la tête des grands établissements publics. Ces nominations expresses dictées par le Prince et qui bénéficient en premier lieu aux proches de Jacques Chirac font grincer les dents.
Le passage de Bruno Racine de la présidence du Centre Pompidou à celle de la Bibliothèque nationale de France (BNF) n’a pas rempli de joie son prédécesseur, Jean-Noël Jeanneney. Bien qu’atteint par la limite d’âge le 2 avril, le président sortant aurait bien voulu prolonger son mandat sur le modèle de Jean-François Jarrige au Musée Guimet. Mais son maintien en poste aurait grippé le jeu de chaises musicales orchestré au sommet de l’État. Normalien, énarque, ancien président de l’Académie de France à Rome, et de surcroît écrivain, Bruno Racine est, tout comme Jarrige, un proche de Jacques Chirac. À Beaubourg, il aura notamment, en fin de mandat, amorcé le projet d’une antenne à Shanghaï et obtenu la gestion domaniale de l’aile ouest du Palais de Tokyo. « Je crois que le Centre Pompidou, une institution lourde, a besoin d’impulsions à intervalles réguliers, souligne Bruno Racine. J’ai accompli ce que j’avais à faire, ouvrir sur une scène artistique mondialisée. » À la BNF, le grand chantier de la bibliothèque virtuelle européenne, qu’a lancé son prédécesseur, ne l’effraie pas. En tant que directeur général des affaires culturelles de la Ville de Paris puis président du Centre Pompidou, il s’est déjà attaqué au défi de la numérisation. « Le projet de numérisation en est au stade du prototype avec la Hongrie et le Portugal, indique-t-il. Il faut étendre le nombre de partenaires européens tout en donnant l’exemple. » Bruno Racine devra aussi mener à bien la rénovation du site Richelieu, cœur historique de la BNF et dont les travaux devraient débuter en 2008.
En quittant Beaubourg, Bruno Racine passe le témoin à Alain Seban, conseiller pour l’éducation et la culture auprès du président de la République, Jacques Chirac, depuis 2005. Cet homme né en 1964, dont certains soulignent « la mécanique intellectuelle brillante », et d’autres le caractère autoritaire et sanguin, devient ainsi le plus jeune président de Beaubourg. Polytechnicien et énarque, Alain Seban a plutôt été un homme des coulisses. Conseiller en 1995 au cabinet de Philippe Douste-Blazy, alors ministre de la Culture, il devient deux ans plus tard le conseiller juridique de l’association de préfiguration du Musée du quai Branly, qu’il accompagne jusqu’à sa transformation en établissement public. En mai 2002, il rejoint le cabinet du ministre des Affaires étrangères en tant que chargé de mission, avant d’être nommé directeur du développement des médias. Bien qu’il n’ait jamais dirigé d’institutions, le voici aux manettes d’un grand pétrolier, en remerciement de services rendus. « C’est un beau défi et j’en mesure la responsabilité, nous a-t-il confié. Cela fait toutefois quinze ans que je suis la politique culturelle et j’ai participé à sa mise en œuvre au plus haut sommet de l’État. Je suis déjà pas mal préparé. » Sa carrière a connu deux points de rencontre avec Beaubourg : en 1996 pour la mise en place avec Jean-Jacques Aillagon des nouveaux statuts de l’établissement ; puis avec la rédaction du discours de Chirac pour les 30 ans du Centre. Bruno Seban ne dévoile pas encore ses cartouches, précisant que « les projets se construisent collectivement ». Tout juste lance-t-il quelques généralités : « Le Centre Pompidou est un défi au conformisme. C’est une institution qui doit se réinventer pour rester en phase avec son époque, ne pas hésiter à susciter débats et controverses. Sa vocation est la plus stimulante qu’on puisse imaginer : porter la création contemporaine au cœur des interrogations de notre époque. »

La BnuE orpheline

C’est lors de la présentation à la presse d’« Europeana », première mouture de la contribution française à la Bibliothèque numérique européenne (BnuE), le 22 mars, que Jean-Noël Jeanneney a annoncé son départ de la BNF. Atteint par la limite d’âge le 2 avril (65 ans), sa demande de dérogation pour poursuivre sa mission jusqu’en 2008, date de fin de son mandat, lui a en effet été refusée. Normalien, agrégé d’histoire, enseignant à l’Institut d’études politiques de Paris et ancien président de Radio France, Jean-Noël Jeanneney a été à l’origine de la réaction européenne face au projet de bibliothèque numérique lancé par le géant américain Google. Une tribune publiée dans Le Monde en janvier 2005 puis un livre (Quand Google défie l’Europe, éd. Mille et Une nuits, 2005) lui avaient permis d’attirer l’attention des pouvoirs publics sur le sujet. En 2005, le président Chirac exhortait ainsi les responsables européens à s’emparer du sujet. L’aventure devra donc se poursuivre sans lui. Nommé par Lionel Jospin en 2002, il était le président d’institution culturelle le plus marqué à gauche. S. F.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°257 du 13 avril 2007, avec le titre suivant : Nouvelles têtes à Beaubourg et à la BNF

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