Musée privé et agence d’art, des solutions alternatives

Le Journal des Arts

Le 25 mai 2001 - 575 mots

La ville de Lyon verra-t-elle émerger un futur musée d’art contemporain totalement privé ? Thierry Ehrmann, fondateur et P-DG du groupe Serveur et de la banque de données Artprice.com, vient d’annoncer la constitution d’une société privée. Il a aussi acheté une parcelle de friches industrielles à Vaise, sur les bords de la Saône, pour bâtir « L’Organe », lieu de promotion d’œuvres réelles et virtuelles. De son côté, l’ancien galeriste Gilbert Brownstone a choisi de transformer sa galerie parisienne en agence d’art, succursale de sa fondation américaine.

“Nous avons fait plancher des équipes de consultants et de juristes, confronté l’avis de conservateurs de musées pour constater à terme que la constitution d’une fondation, telle qu’elle est définie dans la loi française, est un plâtre mal fini.” Comment monter une fondation privée qui n’en n’a pas le nom mais qui en affiche l’aura ? Et comment contourner les règles drastiques fixées par le législateur français ? Telles sont les questions auxquelles le trublion de la Net-économie, Thierry Ehrmann, fondateur et P-DG du groupe Serveur et de la banque de données Artprice.com, doit aujourd’hui se poser. Ce dernier vient en effet d’annoncer la constitution d’un musée privé, “L’Organe”, société anonyme créée le 1er mai et dotée d’un capital de 90 millions de francs. Il a aussi acheté une parcelle de friches industrielles à Vaise, sur les bords de la Saône.

Le projet fait bruisser le monde policé du tout Lyon : annoncée pour 2002 ou 2003, l’ouverture de “L’Organe”, dans le IXe arrondissement, fief du nouveau maire Gérard Collomb, tient du libéralisme le plus affranchi. Thierry Ehrmann avoue un penchant net pour une législation à l’américaine : “Un musée se doit d’avoir la plus totale liberté d’acheter sur le marché des œuvres de premier choix et surtout de se défaire de certaines pièces pour investir de nouveaux choix.” Nul doute que l’exemple visé est celui des musées américains, comme le MoMA qui vient récemment de vendre aux enchères une partie de son fonds patrimonial de photographies (lire le JdA n° 124, 30 mars 2001). Le projet, derrière lequel se profile l’ombre de Bernard Arnault, éternel rival de François Pinault, et actionnaire du groupe Serveur, est encore loin d’être bouclé. L’intention affichée de “L’Organe” est de constituer une collection d’art contemporain, de passer commande de pièces importantes à des artistes internationaux, créations qui seraient, elles, inaliénables, et de constituer un réseau dense entre droits commerciaux, droits d’images, et exploitations sur Internet.

Gilbert Brownstone, un ancien galeriste parisien qui a “arrêt[é] la course aux œuvres accrochées sur les murs”, a lui aussi contourné le droit français sur les fondations. Relevant du droit américain, la Gilbert Brownstone Foundation travaille dans une relative discrétion en France : installée dans les locaux de l’ancienne galerie, elle se veut un avant-poste pour soutenir l’art européen aux États-Unis, faire connaître les artistes présentés par le marchand comme Mosset, Honegger... Elle développe, selon le principe d’une agence d’art, des actions d’aide aux artistes français : la photographe Isabelle Waternaux a reçu une aide logistique et financière pour créer des œuvres nouvelles à New York. La Fondation offrira aussi prochainement des résidences d’artistes sur la côte est des États-Unis, en Floride.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°128 du 25 mai 2001, avec le titre suivant : Musée privé et agence d’art, des solutions alternatives

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