Les attraits de Miami Beach

Le Journal des Arts

Le 22 novembre 2002 - 845 mots

Le choix de Miami pour exporter la Foire de Bâle aux États-Unis est loin d’être le fruit du hasard. La ville est devenue l’une des plus attractives du continent. Alors qu’elle accueille depuis quelques années une population toujours plus branchée, elle est aujourd’hui reconnue comme un lieu « tendance » par excellence. Tandis que les années 1980 étaient marquées par la série télévisée « Deux flics à Miami » et les années 1990 par Madonna et les top models, la Miami du XXIe siècle est peuplée de « Latinos » à la dernière mode et aux portefeuilles bien remplis. De plus, la ville reçoit un cocktail coloré de New-Yorkais pressés, et dispose d’une communauté toujours plus importante d’homosexuels qui ont délaissé la fête au profit d’une vie professionnelle dense, source de revenus confortables.

Comme Prince, Miami a eu sa part de surnoms : l’”Antichambre du Paradis”, la “Côte d’Azur américaine”, ou encore la “Capitale de l’Amérique latine”, ce dernier étant sans doute le plus mérité. Si on estime que d’ici à cinquante ans à peine, un Américain sur cinq sera d’ascendance latino-américaine, ce ratio est dépassé depuis des années à Miami. Les “Latinos” représentent en effet plus de la moitié de la population totale de la ville. Et rien ne semble indiquer le moindre ralentissement de cette tendance, d’autant que la population hispanique est aujourd’hui une des forces économiques vives du pays. Selon le Bureau américain du recensement, le marché latino-américain a augmenté de 61 % au cours des seules années 1990. Aujourd’hui, on compte plus de 32 millions de “Latinos” dans tout le pays, avec un pouvoir d’achat considérable de 348 milliards de dollars (346 milliards d’euros) ! Le Vénézuélien Carlos Cisneros, qui est arrivé à Miami en 1996 et a édifié le Cisneros Television Group, est l’exemple parfait de cette réussite. Véritable géant des médias, il est à la tête de deux chaînes câblées, de deux sites Internet et de deux radios. À l’occasion d’un entretien accordé à la chaîne de télévision ABC News, Carlos Cisneros a expliqué ce qui faisait le pouvoir d’attraction de Miami : “Trois choses comptent avant tout : les forces culturelles, les forces économiques et cette prodigieuse réinvention des médias. Et où peut-on trouver ces trois choses à la fois ? À Miami.” Malgré le recul de l’économie américaine dans sa globalité, le marché latino-américain est très actif à Miami, d’autant qu’il fait office de plate-forme financière pour les vingt-deux pays d’Amérique latine. Et les artistes ne sont pas en reste, Little Havana s’étant transformé en noyau dur de la branchitude. Là, se déroulent des soirées très prisées comme la “Thursday night Fuacata”. “Ici, les ‘Latinos’ sont respectés, expliquait Raquel Glottman – artiste née en Colombie –, dans un entretien accordé à ABC News. C’est un marché important. La plupart des artistes qui réussissent [à Miami] viennent d’Amérique du Sud ou de Cuba. Je pense que les gens ont besoin de partager leurs expériences.” Mais s’il ne fait aucun doute que la communauté hispanique alimente la flamme exotique qui brûle à Miami, la ville n’en reste pas moins américaine, et d’autres segments de la population ont eux aussi contribué à son lustre. Couramment appelée la “Sixième circonscription de New York”, Miami est depuis toujours un lieu de villégiature où New-Yorkais et résidents de la côte nord-est viennent se réchauffer l’hiver. Depuis le 11 Septembre, plus que jamais, l’accent du Nord s’entend partout. L’arrivée de ces amoureux de soleil et de confort a été massive, depuis les musts de South Beach jusqu’aux bodegas de Little Havana. L’influence de New York, qui se ne limite plus aux vacanciers de passage, est notable dans toute la ville, mais surtout à South Beach, où se déploient des postes avancés de l’élite chic, tout droit importés de Manhattan. Le Sushi Samba, la Cafeteria et autres échoppes fleurissent ci et là pour devancer les désirs des nouveaux arrivants logés dans des copropriétés de plusieurs milliards de dollars. En fait, durant les années 1990, South Beach était une extension de Soho, haut lieu de l’hédonisme gay. Le quartier est aujourd’hui plus hétérogène. La communauté gay est peu à peu absorbée par la ville, et nombre de ses membres ont entamé un exode de masse pour aller rejoindre les nouveaux quartiers de l’Upper East side – tels Belle Meade ou Morningside – situés au-dessus de Biscayne Boulevard où s’opère actuellement un réaménagement total. La zone est proche de “Design District,” où galeries d’art et boutiques de design coexistent derrière une barrière d’immeubles branlants et de motels de passe décrépis. Mais l’ensemble arbore encore le style charmant du vieux Miami.

La ville est passée maître dans l’art du renouvellement et de l’évolution socio-économique. Alors même que nombre de voix s’empressaient de la rayer de la liste des lieux d’exception, Miami rebondit et montre une résistance à toute épreuve. La ville n’a jamais abandonné. Comprendre pourquoi Miami reste la ville chérie des médias est en fait assez simple : depuis la Factory d’Andy Warhol, on n’avait pas vu un tel melting-pot de cultures et une fusion si fascinante.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°159 du 22 novembre 2002, avec le titre suivant : Les attraits de Miami Beach

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