Société

PORTRAIT

Joséphine Baker est la première femme noire à entrer au Panthéon

Joséphine Baker, artiste, résistante, militante antiraciste

Par Lorraine Lebrun · Le Journal des Arts

Le 1 septembre 2021 - 539 mots

Joséphine Baker en 1948 © Photo Studio Harcourt
Joséphine Baker en 1948.

1906 Joséphine Baker naît le 3 juin, à Saint-Louis (Missouri, États-Unis) dans un environnement modeste où la ségrégation raciale est prégnante.Pour contribuer aux revenus de la famille, la jeune Joséphine travaille, dès 7 ans, comme domestique pour des gens aisés, Blancs. Un jour, la maîtresse de maison lui plonge les mains dans l’eau bouillante pour la punir d’avoir cassé de la vaisselle. À 13 ans, elle décide de quitter sa ville natale et part avec une troupe de théâtre noire pour New York, où elle fait ses premiers pas dans les cabarets de Broadway.

1925 Repérée, la jeune femme s’envole pour Paris où elle est la vedette de la Revue nègre, présentée au théâtre des Champs-Élysées. Le spectacle – et Joséphine Baker – provoque scandale et enthousiasme. La « Néfertiti des temps présents », selon Pablo Picasso, est conquise par le Paris des Années folles. Elle se lie à Colette et devient l’égérie des surréalistes. Elle se produit dans toute la ville et s’y affranchit du racisme qui a gangréné son enfance. Devenue une icône, elle se joue des codes de représentation du « bon sauvage » avec sa fameuse ceinture de bananes, heurtant une frange de l’opinion plus conservatrice dans un Paris qui accueille aussi l’Exposition coloniale de 1931.

1939 Avec la guerre, elle est rapidement recrutée par le 2e Bureau des Forces françaises libres. « C’est la France qui m’a faite. Je suis prête à lui donner aujourd’hui ma vie. Vous pouvez disposer de moi comme vous l’entendez », dira-t-elle. Son statut d’artiste et sa notoriété lui permettent de traverser les frontières, de se rendre en Afrique du Nord et de transmettre des informations écrites à l’encre invisible sur ses partitions. Elle couvre le capitaine Abtey, chef du contre-espionnage, qu’elle présente comme son secrétaire artistique. Promue sous-lieutenant dans l’armée de l’air des Forces françaises libres en 1942, elle recevra la Légion d’honneur et la croix de guerre en 1961.

1947 Après trois mariages, dont un lui permettant d’obtenir la nationalité française, elle épouse le chef d’orchestre Jo Bouillon et achète le château des Milandes, en Dordogne. Ensemble, ils bâtissent leur « tribu arc-en-ciel », adoptant douze enfants d’origine et de religion différentes, se faisant chantre de la fraternité universelle, au-delà de la couleur de peau ou de la religion.

1963 Ce jour-là, Martin Luther King fait son discours historique (« I have a dream ») lors de la Marche sur Washington pour l’emploi et la liberté. Pour Joséphine Baker, ce jour-là est aussi « le plus beau jour de [sa] vie ». À la tribune, elle est l’une des deux seules femmes, avec Daisy Bates, à prendre la parole en tant que militante antiraciste, vêtue de son uniforme de l’armée française libre.

Mais c’est aussi le début d’une fin de vie difficile. Séparée de Jo Bouillon, ruinée – le château des Milandes est mis aux enchères en 1968, contre sa volonté –, elle se barricade dans la cuisine. Elle trouve refuge à Monaco, mais pour rembourser ses dettes, elle doit continuer ses tournées, s’épuise et tombe malade. Elle meurt le 12 avril 1975.

Les premières évocations de son entrée au Panthéon remontent à 2013, mais c’est finalement à l’automne 2021 que l’icône Baker deviendra la sixième femme et la première femme noire à recevoir cette forme de reconnaissance nationale.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°572 du 3 septembre 2021, avec le titre suivant : Joséphine Baker est la première femme noire à entrer au Panthéon

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