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MOUVEMENT SOCIAL

Grève inédite à la Cité de l’architecture et du Patrimoine

Par Sindbad Hammache · Le Journal des Arts

Le 20 janvier 2023 - 687 mots

PARIS

Les agents de sécurité du musée parisien protestent contre les conditions de travail imposées par le nouveau prestataire.

Cité de l'Architecture et du Patrimoine
Cité de l'Architecture et du Patrimoine
Photo Arnaud 25

Paris. Durant toute la première semaine de janvier, la Cité de l’architecture et du patrimoine (Capa) est restée inaccessible aux visiteurs, paralysée par un mouvement de grève sans précédent depuis son ouverture en 2007. En cause, le changement de la société chargée de la sécurité, depuis le 1er janvier 2023. Les salariés grévistes de la société Korporate, qui a remporté le marché, reprochent à leur employeur des conditions de travail dégradées. Soutenus activement par la CGT-Culture, les grévistes ont obtenu un rendez-vous avec la direction de Korporate pour des négociations au 17e jour de grève. Cette dernière posait jusqu’alors comme condition de la discussion une reprise immédiate du travail.

Un nouveau prestataire sous-dimensionné ?

En décembre, les agents de sécurité de la Capa avaient adressé un signal d’alarme à la direction de l’établissement : « Nous avons dit attention, une petite société comme Korporate n’est pas dimensionnée pour reprendre un tel volume d’heures de travail. » Les revendications des grévistes ne portent pas sur de nouveaux droits, mais sur le rétablissement de leurs conditions normales de travail : tenues de travail propres et adaptées, temps de pause minimum entre deux journées de travail réglementaires, respect des postes et des contrats, plannings délivrés dans les délais réglementaires.

Pour pallier l’absence des grévistes, la société Korporate a fait appel à un sous-traitant, permettant ainsi la réouverture de la Capa dès le vendredi 6 janvier. Catherine Chevillot, présidente de la Cité, estime que ce recours à des sous-traitants ne pose pas de problème de sécurité : « Nous avons veillé à ce que ces personnes soient formées, suivant trois vacations de formation, et qu’elles connaissent les lieux. » Les professionnels de la sécurité, en piquet de grève devant l’établissement, ont quant à eux constaté plusieurs manquements à la sécurité des lieux et des personnes lors du week-end de la réouverture. Les images d’une vidéo tournée les 14-15 janvier montrent ainsi une dizaine de visiteurs sortant du musée en poussant de larges valises à roulettes, bien que le règlement général de visite en vigueur interdise formellement la présence de bagages dans l’établissement. « Les gens ne sont pas en sécurité, les employés ne sont pas en sécurité, le patrimoine n’est pas en sécurité, affirme un gréviste. Les employés du sous-traitant ne connaissent pas le bâtiment, ni les codes d’évacuation et les procédures de confinement. Pour maîtriser un bâtiment comme la Cité de l’architecture à 100 %, il faut bien dix-huit mois ! »

La direction de la Cité rappelle que la résolution de ce conflit social n’est pas de son ressort direct : « Sur le contenu des revendications, nous ne sommes pas opérationnels, c’est l’inspection du travail qui peut être saisie, fait savoir sa présidente. J’ai vivement conseillé aux grévistes de s’adresser aux représentants du personnel de Korporate. Tout ce que l’on peut faire, c’est inciter notre sous-traitant à négocier. »

Outre les conditions de travail des salariés de Korporate, c’est aussi l’attribution du marché à la société qui est en question. Cette dernière n’a pas inclus dans sa réponse à l’appel d’offres la revalorisation salariale supposée être effective au 1er janvier 2023, décidée au niveau national par la branche des métiers de la sécurité. Une donnée qui « n’était dans la proposition d’aucun des candidats », affirme-t-on à la Cité de l’architecture. Le groupe Mondial Protection conteste, assurant avoir intégré cette information qui était « de notoriété publique au moment de la réponse à l’appel d’offres ». Titulaire du précédent marché, Mondial Protection dit aujourd’hui avoir perdu cet appel d’offres « sur la partie prix ».

Un avenant au marché a été proposé à Korporate par la Capa, et pourrait ouvrir la porte à un recours pour « concurrence déloyale » de la part des autres entreprises ayant répondu à l’appel. L’omission de Korporate engage également la Cité, qui au titre de la charte sociale du ministère de la Culture, se doit de « vérifier que la masse salariale [d’un prestataire] permet une rémunération du nombre de salariés conforme à la réglementation (smic, conventions collectives) ». La société Korporate n’a pas souhaité répondre aux demandes d’entretien du Journal des Arts.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°603 du 20 janvier 2023, avec le titre suivant : Grève inédite à la Cité de l’architecture et du Patrimoine

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