Musée

Constance Rivière s’apprête à inaugurer le « nouveau » Musée de l’histoire de l’immigration

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 2 juin 2023 - 755 mots

Succédant à Pap Ndiaye, l’ancienne conseillère de François Hollande a un rapport particulier avec ce lieu pour lequel elle a de grandes ambitions.

Constance Rivière. © Cyril Zannettacci
Constance Rivière.
© Cyril Zannettacci

Paris. Le jeu de mots sur son prénom est facile : Constance Rivière a de la suite dans les idées. C’est en effet elle qui a convaincu François Hollande de venir, en décembre 2014, inaugurer officiellement le Musée national de l’histoire de l’immigration, alors qu’elle était sa conseillère à l’Élysée, sept ans après son ouverture au public en octobre 2007. « Sept ans, c’est long pour une inauguration officielle », avait ironisé François Hollande, sans citer son prédécesseur Nicolas Sarkozy qui n’avait pas voulu inaugurer les lieux, envoyant en catimini Christine Albanel, la ministre de la Culture. Et c’est le même Nicolas Sarkozy que Constance Rivière a accueilli en janvier 2023 pour une visite privée de l’établissement public. Entre-temps, la jeune énarque est devenue la directrice générale du Palais de la porte Dorée, succédant à Pap Ndiaye qui n’y sera resté que seize mois.

Une nouvelle frise temporelle de 1685 à 1995

De la constance, il va lui en falloir pour réaliser tous les projets qu’elle a en tête. Pour l’heure, la priorité est donnée à la réouverture, le 17 juin prochain, des espaces permanents du musée, fermés depuis trois ans. La directrice générale explique cette longue période par le Covid-19, les hésitations sur le projet et le changement de gouvernance. Le parcours est radicalement différent du précédent, au point que, au Palais, on parle de « nouveau » musée. Alors que le parcours précédent racontait la vie d’un immigré, le nouveau, issu d’un rapport de 2018 des historiens Patrick Boucheron et Romain Bertrand, raconte l’histoire des migrations en France en onze dates clefs : de 1685 avec l’édit de Fontainebleau qui entraîne l’exil de 100 000 huguenots à 1995 et l’entrée en vigueur de la convention de Schengen qui institue un espace de libre circulation en Europe. C’est d’ailleurs Constance Rivière qui a préconisé cette dernière date, renvoyant à un espace distinct pour couvrir « le temps présent ».

La nouvelle circulation évite d’avoir à revenir sur ses pas comme c’était le cas auparavant et s’enrichit d’un salon de musique qui permet d’écouter la bande-son des années 1930 à 1960, d’un parcours pour les enfants et d’œuvres d’art contemporain tout au long de la visite. Ce changement de ligne éditoriale, sous la direction de Sébastien Gokalp, le directeur du musée, est rendu possible par l’accroissement de la collection qui compte maintenant six cents pièces.

L’exposition temporaire inaugurale sera consacrée aux migrations asiatiques, un sujet peu fréquent en France et pourtant bien d’actualité. Les prochaines expositions seront consacrées aux banlieues, puis à la cuisine.

Programme des travaux sur dix ans

Mais après la réouverture du « nouveau » musée, il va lui falloir s’attaquer à d’autres gros morceaux. En premier lieu, la restauration du bâtiment dont la Cour des comptes avait montré la nécessité, sinon l’urgence, en 2019. Depuis, un programme de travaux sur une dizaine d’années, pour un coût de 40 millions d’euros a été mis en place avec une petite accélération grâce au plan de relance du Covid. La Porte-Dorée a récupéré 7 millions d’euros avec l’obligation de les dépenser tout de suite pour favoriser la reprise dans le BTP. Une chance qui a permis d’améliorer l’isolation thermique (changement des fenêtres, isolation des salles) et le traitement de l’air avec l’objectif de réduire de moitié les dépenses d’énergie.

Plus tard, Constance Rivière voudrait réaménager le grand hall d’honneur qui manque singulièrement de convivialité pour en faire un espace plus confortable pour les visiteurs et les voisins. Puis elle voudrait réaménager la terrasse extérieure et, pourquoi pas, s’ouvrir sur le bois de Vincennes attenant. Car ce musée « mal né » dispose d’un haut potentiel pour attirer le public local mixte avec une prédominance bourgeoise, mais aussi faire venir dans cet Est parisien en plein redéveloppement les visiteurs des autres grands musées nationaux. « Notre image change, explique la directrice générale, nous recevons maintenant beaucoup de candidatures à nos offres d’emploi » ; et les entreprises commencent aussi à apprécier le lieu et le privatisent – Jean Casteix y a présenté ses vœux aux employés de la RATP.

L’énarque, conseillère d’État, va devoir montrer tout son talent de négociatrice pour convaincre ses quatre tutelles ministérielles d’augmenter son budget de fonctionnement de 12 millions d’euros dont un peu moins de la moitié consacrée à la masse salariale. Mais elle a été à bonne école en tant que secrétaire générale du Défenseur des droits et cette normalienne, autrice de romans, sait tout aussi bien manier la plume.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°612 du 26 mai 2023, avec le titre suivant : Constance Rivière s’apprête à inaugurer le « nouveau » Musée de l’histoire de l’immigration

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