Accueil du public

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 30 juillet 2007 - 774 mots

Les établissements de province rivalisent avec les grands musées parisiens. Le Musée des beaux-arts d’Orléans arrive en tête pour la deuxième fois consécutive.

En termes d’accueil, les établissements de province jouent à David et Goliath avec les mastodontes parisiens. Un poids lourd comme le Musée du Louvre se trouve ainsi devancé par le Musée des beaux-arts d’Orléans, en tête pour la seconde année consécutive, et celui de Roger Quilliot à Clermont-Ferrand. La médaille d’or décernée à Orléans se justifie par son tarif extrêmement attractif et le nombre faramineux de 250 conférences hébergées par son auditorium. Une performance à moduler car seules trente-huit d’entre elles sont organisées directement par le musée…
Un bémol s’impose aussi sur la question de la cafétéria, qui s’apparente dans certains cas à une simple buvette. D’ailleurs, seuls 16 % des musées qui nous ont répondu bénéficient d’un tel équipement. Le Musée des beaux-arts de Rouen (4e) n’en dispose que de manière épisodique. Son café a rouvert au moment de l’exposition « Miroir du Temps » avant de refermer faute d’un flux régulier de visiteurs. Le Musée des arts décoratifs de Paris (17e), qui en était dépourvu à la réception du questionnaire, possède un restaurant depuis janvier.
Des réponses plus précises à notre questionnaire expliquent certaines fortes progressions, comme l’embardée du Musée des arts et métiers de Paris de la quarante et unième à la quinzième place. Les baisses s’avèrent parfois conjoncturelles. Le réaménagement du cinquième étage du musée et les six jours de fermeture à l’automne suite à un mouvement social expliquent le fléchissement du Centre Pompidou de la cinquième à la onzième place. L’échiquier se trouve aussi bouleversé par le Musée de Grenoble (17e), lequel nous a répondu pour la première fois, et surtout la montée en puissance des « nouveaux musées », comme le Musée du quai Branly (5e), les Arts décoratifs à Paris, rouvert en septembre dernier, ou du LAAC (Lieu d’Art et d’Action Contemporaine) de Dunkerque (29e), réaménagé en 2005.
Aussi sophistiqués que soient leurs services, la plupart des « nouvelles » institutions donnent la priorité à la qualité humaine de l’accueil, donnée que notre questionnaire ne peut mesurer. « Nous avons pas mal de sous-traitance dans le personnel d’accueil. Ce sont des gens formés, en poste récemment et pas encore blasés », précise Stéphane Martin, président du Musée du quai Branly. Et de rajouter : « Il faut une relation au long cours avec le public, sur le modèle des usagers des bibliothèques. Pour nous, le bon visiteur, c’est le visiteur récurrent. » Pour cela, l’auditorium, qui voilà encore cinq ans pouvait passer pour un gadget, s’inscrit au cœur du processus de fidélisation. La récurrence suppose aussi un accueil en amont via un site Internet. Mais si 50 % des musées disposent d’un site propre, celui-ci n’est pas toujours très interactif.

Tarifs bas ou gratuité ?

Étrangement, les Musées des beaux-arts de Rouen et d’Orléans affichent des tarifs extrêmement bas en dépit de l’importance de leurs collections. « Nos tarifs sont à la limite du ridicule, admet Laurent Salomé, directeur des musées de Rouen. Cela a un côté sympathique, mais aussi dévalorisant car cela laisse penser que nous sommes un petit musée. » Des tarifs bas à la gratuité n’y a-t-il qu’un pas ? Certes non. Cette mesure, évoquée pour les musées nationaux dans la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, ne soulève que peu d’enthousiasme de la part des institutions. « Je suis favorable à la gratuité, à condition que ce soit une gratuité totale, déclare Stéphane Martin, président du Musée du quai Branly. Si les expositions temporaires sont payantes dans un musée gratuit, cela veut dire qu’on ne pourra plus faire que des expositions grand public. Il faut que la gratuité apporte un élargissement de l’offre et non une banalisation. La gratuité exceptionnelle donne en revanche le sentiment d’être privilégié. » Les directeurs du LAAC de Dunkerque et du Musée d’Art et d’Industrie-La Piscine à Roubaix estiment que la gratuité ne devrait concerner qu’un public de proximité, dans un bassin de population pauvre. Cet avantage ne génère pas forcément un flux massif de visiteurs. « L’expérience a montré qu’après une poussée de la fréquentation les premiers mois, on revient à des chiffres habituels. Ce qui veut dire qu’on n’aura pas forcément élargi le socle, mais qu’on aura moins de gains, indique Laurent Salomé. De plus, le public n’a pas conscience de ce qu’un musée représente en charge. La gratuité laisserait penser que le musée vit tout seul, comme une masse inerte. » Aussi Nathalie Roux, directrice du Musée Roger Quilliot à Clermont-Ferrand prône-t-elle une « implication symbolique du consommateur et du citoyen ». Ce, alors que la billetterie ne représente que 5 % du budget de fonctionnement de son musée.

Les audioguides sont-ils nécessaires ?

Les audioguides, dont seuls 16 % des musées de notre palmarès disposent, sont-ils vraiment nécessaires ? La question n’est pas tranchée. Certains, comme le Musée municipal A.G. Poulain de Vernon (17e), les peaufinent depuis un an, pour une mise à disposition en septembre prochain. D’autres s’y refusent par idéologie. « Je ne veux pas d’audioguide car cela normalise la rencontre avec une œuvre, indique Aude Cordonnier, directrice du LAAC à Dunkerque. Dans une rencontre, l’apport visuel et auditif en simultané crée une confusion et l’un prend le dessus sur l’autre. » Pour Bruno Gaudichon, directeur du Musée d’art et d’Industrie-La Piscine (20e), le renouvellement quatre fois par an de la présentation des textiles freine leur mise en place. « Je travaille avec dix guides en permanence et je ne veux pas leur retirer du travail, précise-t-il. Par ailleurs, on est dans un musée où je suis le seul conservateur. Ce qui suppose que je devrais faire le contenu de l’audioguide, mais je n’en ai pas le temps. » Un outil parfois utile Cependant, cet outil s’avère nécessaire pour une première approche de collections complexes. Aussi le taux d’utilisation de l’audioguide au Musée du quai Branly, de l’ordre de 20 %, s’avère plus élevé que dans la moyenne des musées. « Pour bien comprendre nos collections, les évolutions stylistiques, la question des matériaux, les commanditaires, l’audioguide est nécessaire, renchérit Sophie Durrleman, directrice générale du Musée des arts décoratifs à Paris. Cela permet aussi de ne pas polluer trop les salles avec des cartels interminables. » D’autres solutions sont à l’étude dans certains établissements. Le Centre Pompidou, qui ne possède pas d’audioguides, a lancé un appel d’offres pour la mise en place d’un guide multimédia couvrant les collections permanentes, mais aussi les expositions temporaires et la visite du bâtiment. Le Musée Fenaille à Rodez étudie pour sa part les possibilités de logiciels téléchargeables sur les outils personnels des visiteurs comme l’Ipod et le téléphone portable. À quand une nouvelle génération d’outils d’accompagnement ?

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°260 du 25 mai 2007, avec le titre suivant : Accueil du public

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