Musée - Ventes aux enchères

Des œuvres d’un « musée » privé français en ventes publiques

Par LeJournaldesArts.fr · lejournaldesarts.fr

Le 4 octobre 2017 - 685 mots

PARIS [04.10.17] – Dans quelques jours le Musée d’art classique de Mougins dispersera aux enchères 57 lots issus de ses collections et auparavant exposés dans ses murs. Les œuvres sont la propriété d’un collectionneur privé, non soumis aux contraintes des « musée de France ». Une habile confusion.

Le 10 octobre, la société de vente aux enchères Pierre Bergé & Associés procédera à une vente « Archéologie » comprenant 336 lots. Parmi eux, 57 lots ont une provenance particulière : le Musée d’art classique de Mougins (MACM). Ce « musée » installé sur la Côte d’Azur a décidé de se séparer d’une petite partie de ses collections archéologiques.

Seuls 10 lots sur les 57 proposés à la vente dépassent les 15 000 euros d’estimations hautes, et la liste est variée : objets votifs, grivois, statues et statuettes, bijoux, verrerie et poteries d’Égypte, d’Orient, de Grèce et de Rome. Parmi les 9 lots d’art égyptien, on trouve une statuette d’Osiris en bronze de la Basse Epoque, estimée entre 20 000 et 30 000 euros.

Avec 26 pièces, les antiquités romaines sont les plus représentées. Parmi elles, deux lots se détachent du reste de la vente : un relief de sarcophage d’enfants aux amours vendangeurs et moissonneurs (Art romain, IIIe-IVe siècle) estimé entre 100 000 et 150 000 euros, et une statue de la déesse Hécate représentée par trois corps de femmes adossées à un pilier (Art romain Ier-IIe siècle) estimée entre 80 000 et 120 000 euros.

« Nous nous sommes déjà séparés d’objets conservés dans les réserves du musée par le passé (…) mais c’est la première fois que nous cédons des œuvres exposées dans le musée, et elles sont toutes de qualité muséale », explique en anglais le fondateur du musée Christian Clive Levett dans le catalogue de la vente.

De fait, le propos crée la confusion entre œuvres de musée et œuvres de qualité muséale, une confusion entretenue par le statut de musée privé du Musée d’art classique de Mougins, non labellisé « musée de France ».

Cette structure privée, ouverte en 2011 dans un immeuble ancien de Mougins, abrite la collection du financier britannique Christian Clive Levett. Sur quatre étages, 800 œuvres antiques, médiévales, modernes et contemporaines sont exposées. Depuis 2013, le musée a une politique d’expositions temporaires.

Le fondateur et propriétaire du musée justifie cette vente : « comme de nouvelles pièces ont été acquises, il est temps de faire une rotation des œuvres, et plutôt que d’entreposer des pièces dans les réserves pour une durée indéterminée, nous préférerons nous en séparer pour permettre à d’autres collectionneurs ou conservateurs de les étudier ».

Parées du cachet « Musée d’Art classique de Mougins », les œuvres ont donc toutes été exposées. Mais très peu ont été l’objet de publications scientifiques autres que les livrets de ventes et le catalogue du musée. Et encore moins ont eu l’occasion d’être prêtées et exposées dans des institutions publiques.

Ne bénéficiant pas de l’appellation « musée de France », le Musée d’Art classique de Mougins n’est pas tenu à la dimension de service public qu’induit cette appellation : une équipe de conservateurs et l’inaliénabilité des collections. De même, « toute acquisition, à titre onéreux ou gratuit, d’un bien destiné à enrichir les collections d’un musée de France est soumise à l’avis d’instances scientifiques » comme le rappelle le Code du Patrimoine. Cet avis garantit la cohérence et la qualité des œuvres dans les collections muséales. De fait, le Musée d’Art classique de Mougins obéit plutôt à la notion de collection privée.

Le Musée d’Art classique de Mougins affirme préférer vendre des œuvres plutôt que de les entreposer en réserves. En 2014, un rapport parlementaire sur la gestion des réserves et des dépôts de musées, tout en réitérant le maintien du principe d’inaliénabilité, insistait sur l’importance des réserves : « Disposer de réserves fournies permet en outre une active politique de prêts en permettant un nouvel accrochage temporaire en attendant le retour sur les cimaises des œuvres prêtées ». Un choix que n’a pas fait ce musée privé et qui relance le débat sur l’appellation « musée ».

Légendes photos

Statue de Hécate, marbre blanc, hauteur 69 cm, Art Romain, Ier-IIe siècles - Estimation 80 000 / 120 0000 €

Panneau de sarcophage aux amours vendangeurs et moissonneurs, marbre, 27 x100 cm, Art Romain, IIIe-IVe siècles - Estimation 100 000 / 150 0000 €

Vente « Archéologie », 10 octobre 2017, Drouot Richelieu, Pierre Vergé et associés

Tous les articles dans Marché

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque